En pleine reprise, le consulting forcé de se réinventer
Le Syntec Conseil, l’organisation représentante du secteur du conseil en France à laquelle adhèrent 250 cabinets de tout type – dont 80 cabinets en management et stratégie, notamment Bain, Mars et Roland Berger – présentait à ses membres mercredi 7 juillet les principales conclusions de son étude d’activité annuelle du marché du conseil français. Il en ressort que le conseil en stratégie a été le plus préservé des segments de conseil. Mais le monde d’après n’est plus celui d’avant la covid.

Les cabinets n’ont d’autres choix que de réfléchir aux nouvelles formes du travail au risque de perdre leurs consultants. Ces derniers ont été mis à rude épreuve par de longues journées enfermés derrière leur ordinateur à la maison. Sur un marché désormais beaucoup plus ouvert, l’appel de la concurrence, de la province ou des changements de carrière se fait pressant. Et les turnovers, éteints en 2020, repartent fort !
Huit mois après que le président du Syntec, Matthieu Courtecuisse, estimait le recul de l’activité des membres de l’organisation professionnelle à – 10 % du fait de la covid en 2020, loin des – 30 à – 40 % redoutés par certains au démarrage du premier confinement en mars (relire notre article), le tassement s’avère finalement encore plus léger que cela. Surtout dans le conseil en stratégie qui émerge comme le segment le plus épargné.
C’est ce qu’il ressort des chiffres agrégés par le Syntec Conseil auprès de 100 sociétés de conseil – dont, parmi les cabinets référencés dans le guide des cabinets de conseil en stratégie de Consultor, Ares & Co, Bain & Company, Cepton, CMI, Kea & Partners, Oliver Wyman, PMP et Ylios.
Cinq de ces répondants que le Syntec classe comme cabinets de conseil en stratégie indiquent avoir vu leur activité progresser de + 2 % en 2020 – une tendance autrement plus favorable que les cabinets de conseil en management, en études marketing et sondages d’opinion ou en recrutement. Sur la même période, ces trois familles de consultants ont, elles, vu leur activité se contracter de – 8 %, – 12 % et – 21,5 %, selon les chiffres du Syntec.
Le conseil en stratégie épargné
Même son de cloche côté effectifs : ceux du conseil en stratégie et management (le Syntec ne dispose pas de chiffre pour le seul conseil en stratégie) se sont stabilisés à + 0,6 % alors qu’ils se sont érodés de – 4,8 % dans les études d’opinion et les sondages et de – 6,7 % dans le recrutement.
« La crise n’a pas limité le besoin des organisations à réfléchir sur l’avenir et de recourir à des cabinets de conseil en stratégie pour les accompagner. A fortiori, les cabinets ont été d’une grande résilience en changeant rapidement les thématiques de leurs missions », analyse David Mahé, le fondateur de Human & Work, et le nouveau président de la commission métier du Syntec dédiée au conseil en stratégie & management (lire notre article sur le nouveau conseil d’administration du Syntec).
Et le conseil en stratégie et management est également le plus prompt à repartir : les cabinets répondants déclarent anticiper une progression de leur activité en 2021 de + 10 % par rapport à 2020. Mieux, il ne s’agirait pas que d’un rebond : ces cabinets constatent même une progression de + 3 % au premier semestre 2021 par rapport au premier semestre 2019. Retour à des niveaux d’avant-crise donc.
Des chiffres qui ne sont pas surprenants tant les indices se multipliaient, que ce soit sur le niveau d’activité des cabinets que sur leur besoin en recrutements (relire nos articles ici et ici).
Télétravail, délocalisation : une refondation à formaliser
L’essentiel est ailleurs : sur l’ampleur des changements d’organisation amorcés par la crise du covid.
À commencer par le télétravail dont la pertinence dans le conseil « a été largement démontrée » (relire notre article), selon le Syntec. L’organisation note toutefois que « certaines limites » ont été atteintes comme « des collaborateurs fatigués par des journées à rallonge ».
Des limites qui poussent désormais les cabinets de conseil en stratégie et management à formaliser « un nouvel équilibre à trouver entre télétravail et présence au bureau » : il pourrait passer par « la fin de l’open-space et du bureau individuel au profit du flex office, avec l’installation de petites salles de réunions favorisant le maintien du lien social et l’intelligence collective », anticipe l’organisation.
De même, « une nouvelle définition du travail est clairement amorcée, avec des tâches collectives réservées au présentiel (réunions, idéation, réflexion collective) et des missions plus personnelles (écriture, gestion client) menées prioritairement à domicile », écrit également le Syntec.
Autre sujet de débat au sein des cabinets de conseil dans les prochains mois, la gestion des consultants partis en province au gré des confinements successifs et pour qui le retour en bureau ou en ville est un obstacle.
« Ce sujet de la délocalisation des talents en région est apprécié de façon variable selon les cabinets. Certains refusent de s’appesantir sur ce phénomène, tandis que d’autres ont accepté ce principe et négocient déjà les modalités de cette décentralisation », rapporte sur ce point le Syntec.
Et avec la délocalisation des consultants, se pose la question de l’indemnisation du télétravail (loyers, éventuels billets de train, de la connexion internet, restauration…) sur laquelle certains cabinets ont déjà commencé à plancher. « Un consultant vivant à Paris devra-t-il percevoir le même salaire qu’un autre délocalisé à Bordeaux ? » s’interroge par exemple le Syntec.
Autant de questions brûlantes si les cabinets veulent pouvoir conserver des équipes de consultants dont ils ont vitalement besoin pour staffer les nombreuses missions actuellement vendues (relire notre article).
Car les taux de turnover, complètement atones en temps de covid, rebondissent aussi fort que l’activité. Alors les cabinets instaurent des préboardings dont l’objectif est de maintenir l’intérêt du candidat jusqu’à son arrivée dans l’entreprise ou durcissent leurs conditions de départ.
« Sur le télétravail, nous sortons d’un mode expérimental. Tout le monde est lucide sur le fait qu’il faudra qu’on apporte des réponses pour qu’il devienne un mode serein », anticipe David Mahé.
Sans ces réponses, la sanction en termes de turnover tombera. Déjà, en 2021, les cabinets anticipent une hausse des demandes de reconversion, des congés sabbatiques, ou des départs en province.
Benjamin Polle pour Consultor.fr
Crédit photo : Adobe Stock.
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