« Alvarez & Marsal se vit comme une firme leader » – Guillaume Martinez, managing director France
Depuis quelques années, le regard du marché sur le bureau parisien d’A&M et ses activités a sans doute changé. Quelle est la singularité de son modèle ?

En 2024, Alvarez & Marsal France a connu une croissance de 25 %, ses effectifs atteignant désormais plus de 300 consultants et collaborateurs. Une réussite que certains semblent vouloir copier… « Je ne m’y attendais pas », s’exclame Guillaume Martinez, co-DG du bureau parisien, lui qui s’estime pourtant « habitué à détecter les tendances ».
Né à NYC en 1983 sous la houlette de Tony Alvarez II et de Bryan Marsal, le cabinet, spécialiste des métiers de la restructuration, s’est « beaucoup diversifié depuis 10 ans ». À son scope initial de restructuration opérationnelle et financière s’est ajoutée toute une palette d’activités de due diligences et de transformation.
Dans le monde, il emploie 13 000 personnes, implantées dans 39 pays.
La force motrice d’A&M : « avoir des consultants issus des usines et des secteurs »
C’est grâce « à ses équipes aux profils si différents » qu’Alvarez & Marsal a pu se positionner « comme le leader du marché, au point de créer des standards » – selon Guillaume Martinez. Mais si son offre devient « une référence, il ne faut pas oublier qu’A&M est global et qu’il dispose des ressources pour délivrer ce qu’il promet ».
Un contrat que le cabinet remplit parce qu’il emploie « le plus grand nombre d’opérationnels au monde, les regroupant selon les situations ou secteurs à accompagner ». Au-delà du packaging des offres, la différence naîtrait « de la profondeur des expériences opérationnelles des équipes d’A&M, créatrices de valeur ». Une profondeur opérationnelle qui peut prendre différentes formes – des usines, entrepôts ou magasins à la communication financière auprès des investisseurs. Guillaume Martinez entend le terme au double sens « de l’expérience, et d’avoir quelque chose qui crée un impact ».
La proposition de valeur : au croisement des attentes du board, de l’atelier et des fonds
Les clients d’Alvarez & Marsal sont des corporates et des fonds d’investissement, à 50-50. « Le restructuring représente 20 % seulement de l’activité du cabinet à Paris, et nous travaillons sur la création de valeur ». Un terme « qui perd son sens actuellement dans le monde du conseil », tacle-t-il.
Pour témoigner du positionnement du cabinet, Guillaume Martinez mentionne l’une des nouvelles offres de ce dernier, qui « aiguise la curiosité de [ses] clients. Avec Equity Story Reshape [l’equity story est un récit aussi simple et clair que possible de la proposition de l’entreprise pour les années à venir, destinée à séduire les actionnaires ou investisseurs en exposant comment et pourquoi y investir, ndlr], il s’agit d’aider les grands groupes à comprendre ce que les investisseurs voient en eux – forces comme faiblesses – afin qu’ils puissent agir dessus pour accentuer, adresser, ou changer de partenaires financiers ». Une offre qui rejoint l’ambition d’A&M en matière de transformation, à savoir « agir sur le board et les investisseurs tout autant que sur le shopfloor et les opérations ».
Transformation toujours, « transformation par les coûts », le cabinet ayant été le premier à déployer cette offre durant la période Covid. « Si l’un des outputs est la réduction de coûts, la transformation porte surtout sur les modèles opérationnels, les process, l’organisation, produisant une performance économique bien supérieure. Nous nous intéressons à ce que les gens font et le rendons à son essentiel. » À cela s’ajoutent des leviersd’automatisation et de spécialisation, notamment.
Au niveau international : le turbo-boost de la mission Lehman Brothers
Après la faillite retentissante de la banque d’investissement US Lehman Brothers en 2008, A&M s’est vu confier la gestion de sa liquidation. Pour le cabinet, cela a « tout changé en termes de visibilité et de ressources financières », indique Guillaume Martinez.
Un autre coup d’accélérateur avait été donné à Alvarez & Marsal précédemment, lors de la dislocation du cabinet Arthur Andersen qu’A&M a également gérée. « Cela l’avait mis en contact avec de nombreux talents ». Il y avait alors « 200 personnes à New York, qui ont découvert un nouveau monde – les taxes, le business consulting, le restructuring, etc. ». Un univers que le cabinet a su s’approprier.
Depuis 2002, A&M connaît « une croissance stéroïdée » au niveau global. Pour la France, en 2017 l’élection d’Emmanuel Macron « a envoyé un signal quant au potentiel business du pays : A&M a décidé d’investir davantage dans le bureau parisien », qui avait été créé en 2001.
En 2018 à Paris : pourquoi un « homme du M&A » rejoint-il Alvarez & Marsal ?
Des initiales très présentes tout au long de l'itinéraire de Guillaume Martinez, dans un sens ou l'autre.
En 2018 donc, il opère un « move » vers un cabinet qui commençait à peine à accélérer en France, alors qu’il venait de passer près de 16 ans chez Deloitte, après des débuts chez (feu) Arthur Andersen. Un pari sur l’avenir ?
C’est lors d’une mission pour Safran – au moment du rachat de Zodiac Aerospace, il est alors partner M&A Transactions Services chez Deloitte – qu’il comprend que, pour les transactions les plus complexes, il est indispensable « de traverser les ateliers sous peine de passer à travers le sujet ».
Peu de temps après, Guillaume Martinez croise A&M et se dit que le cabinet a le bon positionnement. À savoir : « Amener des spécialistes Opex vers des situations complexes. » Sachant qu’un Big Four, par exemple, fait grosso modo l’inverse, « en prenant des consultants financiers qu’il rebadge en opérationnels. Au mieux, ceux-ci vont comprendre une activité, mais ils ne l’auront pas vécue ».
Si le fait de rejoindre Alvarez & Marsal a constitué pour lui « une aventure entrepreneuriale [menée en compagnie de Jonathan Gibbons, Frédéric Steiner et Donatien Chenu, tous arrivés conjointement au sein de la practice Transaction Advisory Group du cabinet, ndlr], tout existait déjà. Il fallait “juste” l’amener à des clients en France et en Europe ».
En résumé : un cabinet « qui n’a pas de concurrent »
« Une suite d’expérimentations » répliquées selon leur succès, voilà comment s’est développé Alvarez & Marsal – et comment il continue à le faire. « Tester puis en tirer une expérience », cela fait partie de sa culture. « Nous n’abordons pas les sujets de façon top-down en réfléchissant à quelque chose avant de le tester chez un client. » Point d’ingénierie d’offres au sein du cabinet, bien que ce soit « l’offre qui drive sa croissance ».
Et quand le marché pourrait percevoir ses velléités de déploiement sur le terrain de jeu du conseil en stratégie – avec l’arrivée de Sébastien Declercq ou d’Arthur Grammaticopoulos, tous deux alumni d’Oliver Wyman –, il faut y voir deux stratèges intégrant A&M « pour s’équiper et délivrer de la valeur chez leurs clients de façon plus impactante ». Un impact que les clients du cabinet saluent tout en soulignant « qu’il coûte cher ».
Si la ressource du conseil en strat’, longtemps restée hors de son scope, fait désormais partie « du panel de services que le cabinet veut avoir pour adresser la complexité des sujets », A&M construit son offre « avec des éléments présents chez d’autres, mais l’ensemble [de ces éléments] n’est présent nulle part ailleurs ». Pour Guillaume Martinez, le fait que la progression du cabinet soit nettement supérieure à celle du secteur du conseil montre qu’Alvarez & Marsal « crée son marché ».
En irait-il de même si le secteur lui-même était en forte croissance ? « Sur un marché non discriminant, la différence se fait en partie sur la capacité à livrer un gros volume de missions. Par grand vent, même les dindons volent ! Ce que je constate, c’est que, pour nous, l’offre drive la croissance – et que la progression des autres cabinets est moindre, c’est tout. »
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