Administrations publiques : un relais de croissance durable, mais pas pour tous les cabinets

En dix ans les administrations sont passées du rang de client occasionnel à celui de partenaire régulier

Si le mariage semble a priori contre-nature, le secteur public émerge pourtant comme un relai de croissance durable pour les cabinets de conseil en stratégie. L'exercice 2011 ne déroge pas à la règle.

Benjamin Polle
08 Jan. 2012 à 17:00
Administrations publiques : un relais de croissance durable, mais pas pour tous les cabinets

Fin décembre, l’administration publique devait représenter 15% du chiffre d’affaires global des cabinets, soit pas loin de 600 millions d’euros, à en croire les 102 cabinets de tailles diverses interrogés par la fédération nationale des cabinets de conseil, Syntec, qui se dit représentative de 60% des entreprises du secteur.

Un tel volume nous montre que les administrations commanditaires sont le troisième plus gros demandeur de prestations de conseil, derrière les services financiers, avec 30% du chiffre d’affaires global, et l’industrie, avec 23%, mais loin devant les secteurs des énergies et de l’environnement, du transport et de la distribution, qui tous plafonnent à moins de 10%.

Dix ans plus tôt, le secteur public faisait plus figure de partenaire occasionnel, avant de croître à son niveau actuel en 2006 puis 2007, à rebours de la plupart des autres secteurs en perte d’allure dans un contexte économique défavorable.

Parmi les causes d’une pareille embellie, la Révision Générale des Politiques Publiques, dite RGPP, joue un rôle moteur. Le grand ménage de printemps au sein des ministères et des administrations avait été initié par le gouvernement en juin 2007. Quatre ans plus tard, le programme a contribué à la suppression de 150 000 postes de fonctionnaires et à des économies de 15 milliards d’euros, selon des chiffres avancés par le gouvernement.

Une rationalisation économique à laquelle les cabinets de conseil ont été associés : « des travaux thématiques ont été confiés à des équipes mixtes d’audit, chacune composée à la fois de membres d’inspections ministérielles et interministérielles – l’un d’entre eux assurant la présidence de l’équipe – et de consultants de cabinets privés d’audit » indiquait ainsi le rapport d’information parlementaire publié sur la RGPP en novembre.

Au total, comme nous l'indique ce rapport, ce sont 100 millions d’euros qui ont été alloués depuis 2007 à des marchés publics de modernisation de l’Etat, dont McKinsey, le Boston Consulting Group et Roland Berger ont été parmi les principaux récipiendaires.

Pourtant, les ministères ou les directions générales en tous genres n’expliquent que pour partie la croissance du secteur. Sur la même période, entre 2008 et 2011, la Caisse des Dépôts, le Pôle Emploi, l’Ademe,la Bibliothèque Nationale de France, l’INA, le CHU de Nancy, les Hospices de Lyon, le Port Autonome de Paris, la CCI de Paris et le Syndicat des Transports d’Île de France, entre autres, ont eux aussi fait appel à des cabinets privés, à en croire les données que nous avons extraites du Bulletin Officiel des Attributions de Marchés Publics (BOAMP).

missions_conseil_en_strategie_secteur_public2

Une multiplication des commandes dont on se félicite du côté de la Direction Générale de la Modernisation de l'Etat (DGME) : "la coopération entre des équipes privées et des équipes de l’administration – que ce soit des inspecteurs ou des fonctionnaires – est gage de crédibilité, de solidité des recommandations" nous indique la direction jointe par Consultor.fr. On vante "la méthodologie" et "la culture de projets" apportés par les cabinets, "tout simplement parce qu’ils ne sont pas parties prenantes de la routine ou des habitudes". Créée au sein du ministère du budget en 2005, la DGME est en charge de la coordination des politiques de modernisation de l'Etat.

Ces prestations concernent aussi bien la définition d’enjeux stratégiques, que des missions d’assistance en ouvrage informatique et de conduite du changement. En trois ans, le Boamp ne recense pas moins d’une soixantaine de contrats, dont les valeurs s’échelonnent entre 50 000 et plusieurs millions d’euros.

Si manne du public il doit y avoir, tous les cabinets n’en tirent pas partie de manière égale. Ainsi, sur la base des données disponibles sur le Boamp, Roland Berger, McKinsey et le Boston Consulting Group tirent leurs épingles du jeu – en nombre de commandes pour le moins – avec près de la moitié des prestations à eux trois.

Cette tendance à la hausse, les cabinets cherchent à la pérenniser. Au niveau de l’Etat, c’est par exemple Syntec en septembre qui y est allé de ses « 49 propositions » pour renforcer la compétitivité de la maison France. Au même moment, Roland Berger proposait ses propres solutions à la crise de la zone euro.

Et ces clins d’œil à répétition des cabinets aux administrations semblent devoir porter leurs fruits : "Rien n’empêchera ce savoir-faire de s’exprimer à nouveau dans les années qui viennent. Il peut même être étendu au secteur hospitalier, aux collectivités locales en y apportant les ajustements qui conviennent" plaide-t-on du côté de la DGME.


Benjamin Polle pour Consultor, portail du conseil en stratégie- 06/01/2012

Benjamin Polle
08 Jan. 2012 à 17:00
tuyau

Un tuyau intéressant à partager ?

Vous avez une information dont le monde devrait entendre parler ? Une rumeur de fusion en cours ? Nous voulons savoir !

écrivez en direct à la rédaction !

commentaire (0)

Soyez le premier à réagir à cette information

1024 caractère(s) restant(s).

signaler le commentaire

1024 caractère(s) restant(s).
10 - 3 =

France

  • Chief of staff : un métier très consultant-compatible
    15/04/24

    Elle fait office de bras droit du CEO et de chef d’orchestre managérial. La fonction de chief of staff a débarqué en France il y a une quelques années seulement dans le monde de la tech et se développe à vitesse grand V. Un poste taillé sur mesure pour les profils de consultants en stratégie. Six d’entre eux nous font découvrir ce métier couteau suisse qui s’avère aussi un intéressant poste tremplin pour les alumni du conseil.

  • Strategy& : deux départs dans le partnership
    15/04/24

    Après l’arrivée/la promotion de 9 partners en 2023 chez Strategy&, 2 autres associés ont quitté récemment l’entité stratégie de PwC : le partner François Aubry, arrivé en 2022 (qui a rejoint Roland Berger), et le partner Guillaume Charly, depuis 2020 au sein du cabinet (qui ne communique pas pour l’instant sur sa nouvelle destination).

  • Après 34 ans chez L.E.K., Clare Chatfield tire sa révérence
    12/04/24

    La senior partner Clare Chatfield, entrée chez L.E.K. en 1990, à la tête de la practice Énergie et Environnement depuis 2000, a quitté le cabinet après près de 35 ans de carrière.

  • Un petit tour et puis s’en vont : départ de deux partners d’Oliver Wyman
    11/04/24

    Arrivé en février 2022, Henri-Pierre Vacher quitte le cabinet au sein duquel il co-pilotait la practice Private Capital. Autre départ notable, celui d’Hervé Collignon, chez Oliver Wyman depuis mars 2023 et qui œuvrait à la practice Communications, Média et Technologie du cabinet.

  • INSEAD 2023 : 7 top recruteurs sur 10 sont des cabinets de conseil
    10/04/24

    Disposant d’un campus historique à Fontainebleau et de 3 autres sites dans le monde, l’INSEAD publie chaque année ses statistiques d’emploi des titulaires de MBA. Quelles marques - de conseil en stratégie ou corporate - ont particulièrement recruté, dans quels secteurs d’activité et sur quelles zones géographiques ? Focus sur les cohortes de diplômés de décembre 2022 et juillet 2023.

  • Flashback : le partner français qui a changé la dimension de Roland Berger à Paris
    08/04/24

    En 2000, Roland Berger France est un cabinet de conseil en stratégie confidentiel en matière d’effectifs et de notoriété. En 2010, il a intégré la cour des grands. Retour sur le parcours de Vincent Mercier - avec le principal intéressé - pour une immersion en terres de conseil et de grandes entreprises, jusqu’au fameux pilotage des années folles du bureau de Paris.

  • Classement Choiseul 2024 : un bon millésime pour le conseil en stratégie
    29/03/24

    Pour cette douzième édition, ce sont 17 alumnis du conseil en stratégie qui font partie du classement 2024 des 100 leaders de moins de 40 ans de l’institut Choiseul.

  • Hakim El Karoui, l’ex de Roland Berger, lance sa bataille contre l’extrême droite
    25/03/24

    Il avait passé 4 ans chez Roland Berger de 2011 à 2016 avant de créer son propre cabinet de conseil en stratégie. Hakim El Karoui, essayiste, spécialiste de l’immigration, de l’islam et de l’islamisme, banquier d’affaires, enseignant…, vient d’être réélu président du Club 21e siècle (un club qu’il a fondé en 2004 et dont il a déjà été président jusqu’en 2010).

  • La mission de cœur du consultant de McKinsey pour les enfants confiés à la nation
    21/03/24

    Il est urgent de sortir de l’ombre les jeunes issus de l’Aide sociale à l’enfance (ASE), souvent réduits à l’expression « enfants de la DDASS », en construisant leur insertion professionnelle.

Super Utilisateur
France
secteur public, étude, cabinet de conseil en stratégie, france, 2008, 2011, mckinsey, bcg, roland berger, DGME
3195
0
France: Administrations publiques : un relais de croissance durable, m