L’IA, seule consultante d’un nouveau cabinet de conseil en stratégie
Les consultants remplacés par l’IA ? On en parle depuis le lancement de ChatGPT fin 2022, ou presque. Xavier AI et son CEO-cofondateur, Joao Filipe, annoncent l’avoir fait.
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Derrière Xavier AI se cachent deux profils bien humains et complémentaires.
Le premier, Joao Filipe, diplômé de la Nova School of Business and Economics en 2016 et titulaire de plusieurs MBA (HEC/Wharton/INSEAD), a pratiqué le conseil en stratégie chez McKinsey entre 2018 et 2021. Il est aussi programmeur autodidacte.
Joao Filipe confie à Consultor avoir cofondé Xavier AI « en repensant à son expérience dans le conseil : 99,99 % des entreprises ne peuvent s’offrir une expertise de qualité, comme celle délivrée par McKinsey ». Selon lui, grâce à Xavier AI, toutes les entreprises pourront bientôt accéder « à la puissance d’un cabinet de conseil quand elles en ont besoin ».
Le second, Philip M. Parker, professeur à l’INSEAD (Singapour) où il enseigne l’IA et le Machine Learning, a développé plusieurs plateformes éducatives à base d’IA en utilisant des technologies d’automatisation ou des « moteurs de contenu » – qui ont été brevetés. Ces moteurs sont actuellement mobilisés dans des projets parrainés par la Fondation Bill et Melinda Gates en Afrique, Asie et Amérique latine.
Initiateur de Botipedia.org, une encyclopédie algorithmique générant des milliards d’articles en 109 langues, Phil Parker a opéré des formations auprès de McKinsey et de Strategy&/PwC notamment.
Sur l’aspect financier, plusieurs investisseurs de la Silicon Valley se sont engagés dans l’aventure. Une nouvelle levée de fonds aura lieu dans les prochains mois, le montant visé étant de 15 millions de dollars
Xavier AI et son outil natif associant plusieurs technologies
Joao Filipe évoque une approche « unique, la génération dynamique multiméthode (DMG). Elle complète les résultats des grands modèles linguistiques par des méthodes déterministes et des sources de données vérifiées afin de minimiser les hallucinations et de garantir la qualité » du contenu généré.
Quid de ses fonctionnalités ? DMG peut « comparer et étalonner les entreprises, estimer la taille des marchés et construire des modèles financiers à la volée sur la base des données fournies par l’utilisateur – en utilisant des méthodes déterministes explicables ».
Concrètement, les early adopters de l’outil le mobilisent pour améliorer « leur planification stratégique et optimiser leur approche commerciale ».
Une proposition de valeur distinctive ?
D’autres outils IA réalisent déjà des tâches spécifiques du conseil en stratégie, ce qui a conduit certains cabinets à les adopter ou à en développer des similaires en interne. C’est le cas d’eleven et de PMP Strategy – qui ont conçu leurs propres outils (eleven) ou infrastructures (PMP Strategy) – ou encore de PwC/Strategy& et Bain, deux cabinets ayant souscrit des licences de GenAI tout en élaborant des chatbots « maison ».
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La part de missions liées à l’accompagnement des entreprises sur les enjeux d’IA/IA générative s’accroît au sein des cabinets. Mais qu’en est-il de l’équipement des consultants en interne ?
Au-delà des technologies qu’il combine, en quoi Xavier AI se distingue-t-il donc des autres propositions du marché ?
Selon Joao Filipe, « en entreprise, les utilisateurs se lassent déjà de l’interface des chatbots, or, la plupart des outils d’IA sont basés sur ces derniers. Par ailleurs, ils ne fournissent pas vraiment de livrables d’une qualité équivalente à ceux des consultants ».
Xavier AI offrirait de son côté « une meilleure expérience multimodale, avec des sources détaillées, des données de qualité, des plans d’action et d’autres fonctionnalités intéressantes conçues sur mesure pour les utilisateurs professionnels chevronnés ». Ou, à l’inverse, à destination de personnes « qui ne sont pas des businessmen, comme les agriculteurs africains. Nous avons créé un programme personnalisé adapté à chaque culture, au sol et au climat, afin de les aider à produire davantage grâce aux bonnes techniques », précise ainsi Joao Filipe.
Par ailleurs, pour répondre à l’observation selon laquelle « des consultants IA ne peuvent se rendre sur le site de leurs clients », les deux cofondateurs développent actuellement Xavier Actions, à savoir « des recommandations actionnables basées sur les présentations », que les clients pourront automatiquement « mettre en œuvre grâce à des intégrations telles que Salesforce, Slack ou SAP ».
En avril 2025, Xavier Ai revendique des accompagnements dans le secteur bancaire – une banque internationale de 50 000 employés notamment –, dans les télécoms, l’éducation ou auprès de gouvernements. Il s’adresse aussi bien à des start-ups qu’à de grands groupes, « des solutions personnalisées » pouvant être proposées aux entreprises.
Un compétiteur imbattable pour les consultants en strat ?
« Ce service devrait être déclaré illégal. » Telle fut la réaction de consultants de grands cabinets auxquels des clients ont partagé des analyses du consultant IA – selon Joao Filipe.
Interrogé sur la disruption que pourrait provoquer Xavier AI ainsi que ses futurs concurrents, l’ancien consultant de McKinsey partage sa vision « du rôle du consultant dans la chaîne de valeur », voué à long terme à être « complètement bouleversé ». Selon lui en effet, les consultants ne sont pas dans la même situation que « les avocats ou auditeurs, légalement responsables et redevables – au sens strict du terme – de leurs conseils quand ils apposent leur signature au bas d’un document ».
En ce qui concerne le conseil en stratégie, là où les années 1980-90 ont été propices « grâce au transfert de connaissances et au partage des meilleures pratiques, dans un contexte de mondialisation et de marchés émergents, désormais ces connaissances peuvent être transférées de façon beaucoup plus efficace, via l’IA, entre différents secteurs, régions et entreprises ».
Dans cette perspective, Joao Filipe encourage « les brillants esprits qui s’orientent vers le conseil ou la banque d’investissement à travailler plutôt à la frontière de la technologie et de la science ». Ce serait désormais, selon lui, « leur véritable vocation ». À suivre.
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