Le développement durable, poids mort de la stratégie ?
À l'approche de la Conférence sur les changements climatiques qui se tiendra à Paris à la fin de l'année, Consultor se demande quelle place tient le développement durable dans le conseil en stratégie. Peu visible, le sujet n'est cependant pas complètement absent des missions.
Passé de mode le conseil en développement durable ? C'est l'impression que laisse planer la discrétion des cabinets de stratégie sur le sujet. Alors que dans l'effervescence du Grenelle de l'environnement 2007, plusieurs cabinets dédiés se sont montés et qu'il était de bon ton d'évoquer la question dans la moindre plaquette de communication, le soufflé semble être retombé.
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Le parcours de Thomas Gault est à ce titre exemplaire. Après des débuts chez Masaï, le consultant fonde en 2008 avec deux associés Auriverde, un cabinet de stratégie opérationnelle. « Le film d'Al Gore, le livre Green to gold de Daniel Esty et Andrew Winston... ces éclairages nous ont fait comprendre que l'idée selon laquelle le développement durable coûtait plus cher était majoritairement fausse si on agissait avec ambition, en plaçant le sujet au cœur de la stratégie et du business model des entreprises et en lien avec les grandes fonctions transversales de l'entreprise », résume Thomas Gault.
Le développement durable créateur de valeur ? Ce positionnement rencontre un succès assez rapide puisque Auriverde remporte coup sur coup deux grands projets en 2009, dans la restauration et dans une entreprise familiale, qui se dérouleront respectivement sur un an et demi et deux années. « Le second projet particulièrement était une excellente synthèse de ce que nous voulions faire : revoir tous les grands enjeux de l'entreprise à travers le prisme environnemental et ce faisant, réduire les coûts », poursuit Thomas Gault. Mais en 2011, avec la nouvelle vague de la crise économique, l'enthousiasme des clients, qui parent au plus pressé, s'essouffle. Ce nouveau contexte associé à une crise de croissance de ce petit cabinet signe la fin de l'aventure d'Auriverde fin 2012. Depuis, Thomas Gault a été recruté par EY au sein d'une practice développement durable qui rassemble 80 personnes.
Des secteurs et des fonctions plus ou moins impactés
Ce qui n'est pas forcément le cas des grands cabinets de stratégie d'ailleurs. « Le développement durable n'est pas l'objet d'une pratique spécifique et nous n'avons pas de structure dédiée avec des consultants spécialisés, même si nous avons un réseau mondial d'experts qui, à travers leurs différentes approches, ont un intérêt et une expérience de ce sujet », indique de son côté Laurent Dumarest, senior partner d'A.T. Kearney. Certains secteurs sont de fait plus demandeurs de missions directement liées aux enjeux environnementaux. L'énergie, avec les problématiques d'énergies renouvelables ou de mix énergétique ; la chimie, avec les enjeux de chimie verte ou encore la santé, ou l'agroalimentaire. Des fonctions – supply chain, achats – sont également davantage impactées.
Mais globalement, il existe une certaine dilution de ces problématiques dans les entreprises. Faisant peut-être moins l'objet d'affichage que par le passé, les sujets environnementaux et sociétaux – puisque ce sont les deux facettes du développement durable les plus concernées – se sont aujourd'hui diffusés dans toutes les fonctions de l'entreprise. Thomas Gault note même un progrès : « Ces sujets, auparavant confiés à la communication, commencent à être rattachés à des fonctions opérationnelles ou sont pilotés par des directions développement durable », assure-t-il. Laurent Dumarest se veut même plus optimiste : « Le développement durable est au cœur de beaucoup de décisions d'investissement, de stratégies de croissance ou de compétitivité. Au fond, aucun projet ne peut en faire abstraction », conclut-il. Reste que les clients sont toujours étrangement discrets sur la question.
Gaëlle Ginibrière pour consultor
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