Associé-actionnaire vs associé-salarié : l’entrée au capital change-t-elle le métier de partner ?
Au sein des sociétés de conseil, deux modèles de « partnerships » coexistent : le partnership classique, où les associés intègrent le capital en tant qu’equity partners, et un modèle salarié où les « VP » n’acquièrent pas de parts de la société. Passage en revue et témoignages sur ces deux modes de fonctionnement.
Entrer au capital, c’est ce que proposent de nombreux cabinets de conseil à leurs consultants devenus partners ; d’autres cabinets n’envisagent pas cette option, censée être porteur de motivation. Oliver Wyman est dans ce cas. Filiale à 100% de Marsh, la société n’est pas un « partnership » : les « partners » n’ont pas accès au capital.
Comme dans beaucoup d’endroits, pour atteindre le grade de partner, le principal doit plaider son cas auprès des 450 partners déjà nommés dans le monde. « Devenir partner, c’est une méritocratie. Les partners sont tous égaux, il n’y a pas de hiérarchie. Notre intérêt commun est de réaliser de la croissance, sur laquelle nous percevons un intéressement », indique Hanna Moukanas, « Partner » chez Oliver Wyman, mais pas au sens d’associé au capital donc.
Un modèle qui ne semble pas empêcher la société d’employer 3 000 consultants dans le monde, et de connaître une croissance moyenne annuelle de 11 % ces dernières années.
Vers un partnership moins systématique ?
Le partnership pourrait avoir tendance, d’après Hanna Moukanas, à avoir un « revers indésirable : un effet de rente », qui pousserait ainsi les seniors partners, et détenteurs du capital, à prendre moins de risques.
Autre argument contre le partnership, il ne serait plus tout à fait adapté à la mentalité des jeunes consultants. C’est en tout cas ce que fait valoir Karim Hatem, senior partner et cofondateur d’Ylios, cabinet qui réunit sept associés, dont trois détenteurs de parts, et vingt-cinq consultants. « Rejoindre le partnership est une motivation moins systématique. Cela représente un niveau de contrainte que les jeunes générations ne sont pas toujours prêtes à accepter. Ils ont vu leurs parents se heurter à un système qui n’a pas toujours respecté ses engagements, et sont moins enclins à s’engager pour un contrat où tout n’est pas écrit. »
Ylios propose ainsi un « limited partnership », permettant aux consultants de devenir « partner », sans achat d’actions. Soit un statut d’associé, récompensant l’expérience et la performance, qui n’entraîne pas forcément un investissement financier. Un statut qui aurait été pensé en fonction des attentes des salariés.
Des efforts pour devenir Partner
Pourtant, cette reconnaissance et cette envie de lier son parcours professionnel à celui de l’entreprise semblent rester populaires. Kea & Partners propose ainsi à ses consultants, dès trois ans d’expérience, d’acheter des parts de l’entreprise. Plus généralement, le fait d’être associé au capital d’un cabinet a-t-il une vraie influence sur la motivation ?
Pour Olivier Mouton, partner chez Kea, cela a un véritable sens. « Nous avons, très jeune, une part dans l’entreprise dans laquelle nous travaillons. Ainsi, monter au capital est important assez vite. J’ai pu me projeter dans l’entreprise. Au fur et à mesure, la montée dans le capital permet d’être associé aux décisions stratégiques. »
Un engagement qui est aussi financier, acquérir des actions demande un investissement, et donc un choix : « Passer partner représente un certain montant, ce qui a posé la question de mon engagement dans l’entreprise. J’ai confiance en mon cabinet, c’est un réel investissement. Cela m’a demandé des efforts dans ma vie privée. J’avais 35 ans quand je suis devenu « Directeur » (premier grade de « Partner » chez Kea, ndlr), et cela m’a questionné, notamment sur l’achat d’un bien immobilier : “est-ce que j’achète une pièce en plus, ou est-ce que j’investis dans mon entreprise ?” ».
« Un sujet dont on discute »
Chez CVA, qui réunit quarante consultants pour six partners, le partnership n’est plus ouvert. L’accès au grade de « Partner » nécessite une cooptation de la corolle des autres « associés » (on ne parle pas des détenteurs du capital), comme au sein des autres cabinets. Le senior manager devenant partner est ainsi reconnu par tous, comme développant des ventes et un business pérenne.
Cette absence de partnership serait « très bien vécue ». Cependant, « c’est un sujet dont on discute, même s’il n’y a pas de timing », indique Arnaud Bodji, senior manager. « La réouverture de capital est quelque chose qui se fera un jour ou l’autre, car il y a sûrement une motivation complémentaire à faire partie du capital de la société. »
Victor Nicolas pour consultor.fr
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