Renault : la double mission carve-out d’EY-Parthenon

Ce n’est pas un, mais deux carve-out de grande ampleur que les équipes d’EY-Parthenon ont accompagnés pour le groupe Renault. À la clef, deux nouvelles entreprises créées en 2023 : Horse et Ampère. Et pas moins de 2 ans de travail pour le cabinet. Récit de missions avec Aurélie Saulnier, associée Strategy & Transaction, et Grégoire de Franqueville, à la tête du projet Horse chez Renault.

Barbara Merle
25 Jan. 2024 à 12:00
Renault : la double mission carve-out d’EY-Parthenon
Renault

Entre 2021 et 2023, le cabinet EY-Parthenon (avec l’ensemble des autres expertises d’EY) a travaillé quasi simultanément à deux carve-out inédits pour le groupe Renault : le lancement de deux nouvelles entités indépendantes, l’international Horse, et le 100 % français Ampere. Et c’est dans le cadre d’un appel d’offres des plus classiques que ce cabinet a été choisi pour cette mission bicéphale notamment pour son expertise du secteur auto et de ces complexes projets de détourage, grâce à ses équipes multidisciplinaires dédiées du géant EY.

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Ces deux opérations hors norme ont mobilisé une centaine de consultants chez le géant de l’audit EY, dont 15 consultants temps plein chez EY-Parthenon, avec comme cheffe d’orchestre Aurélie Saulnier, partner Strategy & Transaction. Côté Renault, deux patrons de projets étaient les interlocuteurs privilégiés du cabinet : le VP Grégoire de Franqueville pour Horse et l’ancien project leader du BCG, Jérôme Faton, pour Ampere (nommé VP Strategy pour l’occasion). Lancer deux carve-out de cette envergure à quatre mois d’intervalle, « un challenge passionnant », un projet « extrêmement ambitieux emmené par Luca de Meo (PDG du groupe Renault, ndlr) », reconnaît Aurélie Saulnier. 

Cet accompagnement sur la longueur par des consultants externes s’avérait incontournable pour la tête pensante de Horse, Grégoire de Franqueville, près de 25 ans de maison Renault, directeur international du développement et partenariats de Renault. « Il (le cabinet EY/EY-Parthenon, ndlr) nous a très clairement aidés en termes de méthodologie pour chaque étape du projet, mais aussi sur le suivi et la résolution des complexités que nous avons rencontrées pendant ce projet. Celui-ci avait clairement l’expérience très opérationnelle de ce type de projet. »

Nouvelle accélération du plan strat’

Le groupe Renault, 46,4 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2022, est en effet en pleine Renaulution, le nom de son plan stratégique autour de ses marques fortes, Renault, Dacia, Alpine, Mobilize, dévoilé début 2021 par Luca de Meo, son PDG (en poste depuis l’été 2020). Un plan divisé en trois étapes, la « Résurrection », la « Rénovation » et la « Révolution ». Son ambition : restaurer la compétitivité.

Dans cette troisième étape de « Révolution », ces deux carve-out paraissaient aussi indispensables pour écrire le futur du groupe auto, comme le partage Grégoire de Franqueville pour Horse. « L’industrie automobile se transforme très rapidement, autour de plusieurs axes, notamment celui croissant de l’électrique et du software d’un côté, et de l’autre celui des motorisations thermiques et hybrides qui restera encore prédominant dans le monde pendant de nombreuses années. Les enjeux, les compétences et les écosystèmes sont différents, et cette transformation a pour but d’apporter une réponse rapide et adaptée à chacun de ces challenges », atteste l’architecte en chef de Horse.

Même son de cloche du côté de la spécialiste des mobilités, Aurélie Saulnier, partner d’EY-Parthenon. « C’est le sens de l’histoire, l’industrie automobile est dans une phase clé de sa transformation, poussée, notamment, par la réduction réglementée des émissions de CO2 (Euro7), la transition vers la mobilité électrique, et le développement des technologies autonomes (SDV). Horse rassemble l’ensemble des activités liées au développement, à la production et à la fourniture de moteurs thermiques et hybrides. Ampere est un pure player du véhicule électrique et du software, et devient le fer de lance du groupe Renault en matière d’innovation électrique et technologique. Les deux projets, Horse et Ampere, se parlent et constituent des étapes clés pour relever les défis liés à la transformation du secteur, caractérisé par une concurrence toujours plus accrue. »

EY-Parthenon, dans le circuit Renault pendant 2 ans

C’est en octobre 2021 que les équipes Strategy & Transaction d’EY-Parthenon sont entrées dans la danse de cette « Renaulution », au moment où le groupe réfléchissait aux possibles contours de Horse. « Les équipes M&A du groupe Renault souhaitaient être éclairées dans cette idée qui n’avait pas encore de contours opérationnels et financiers bien définis. Nous sommes intervenus en tant qu’experts du carve-out, et à travers une analyse de faisabilité, nous les avons aidés à définir les contours précis de Horse tout en identifiant les complexités opérationnelles de séparation associées, sans oublier les questions de valorisation », explicite Aurélie Saulnier. Cette analyse de faisabilité réalisée par une équipe projet restreinte tant côté Renault que côté EY, finalisée à la fin de l’année 2021, a permis de définir le futur Horse lancé officiellement au premier trimestre 2022. « Horse a été l’une des premières briques visibles de cette stratégie », ajoute Aurélie Saulnier

Étape suivante pour la cheffe d’orchestre d’EY-Parthenon : une phase de préparation détaillée et de construction du modèle opérationnel cible de Horse. « Nous avons repris l’objet en travaillant concrètement sur son fonctionnement opérationnel. Cette phase de design a été lancée en mars 2022 avec une équipe beaucoup plus large (tant conseils que Renault), qui a mobilisé l’ensemble des fonctions de l’entreprise de la R&D au manufacturing en passant par la finance et l’IT. »

Un travail d’orfèvre d’environ 5 mois de la réalisation d’un mapping de l’existant jusqu’au design détaillé du modèle opérationnel au Day One « qui nécessite de cartographier l’ensemble des interdépendances et flux existants entre le groupe Renault et les activités à détourer », où il s’agit notamment « d’identifier comment sont opérés les processus de chaque fonction, quelles sont les ressources dédiées ou partagées, d’obtenir une vue précise quant à la transférabilité des contrats et des actifs et de bien cartographier l’environnement applicatif et le niveau d’imbrication des systèmes d’information », comme le pointe Aurélie Saulnier. Au-delà de la définition du modèle cible, cette phase a permis au cabinet de définir un planning de séparation détaillé « qui constitue le socle de la phase d’exécution des activités de séparation ».

En parallèle de ces travaux très opérationnels, le cabinet a travaillé sur d’autres sujets « en interaction immédiate », à l’instar des problématiques fiscales et légales, « mais aussi les besoins en matière de détourage financier et la mise à disposition de comptes standalone, ajouter à cela le processus M&A avec Geely, ainsi que la timeline fixée par Luca de Meo », amende la partner. Un projet transverse donc, supposant des compétences multiples nécessitant l’implication de plusieurs services line EY et EY-Parthenon : des équipes transaction diligence, des experts de carve-out opérationnel et financier, des fiscalistes, des équipes stratégie… « Nous avons eu des périodes à plus de 100 consultants mobilisés, sans parler de la dizaine d’associés impliqués de façon continue sur les deux projets. »

Horse et Ampere en roue libre

Suite à ce travail commun entre Renault et EY-Parthenon, ce sont donc deux entreprises indépendantes qui ont vu le jour. La société internationale Horse, une association avec le chinois Geely Aurobay, lancée au 1er juillet dernier, 9000 anciens employés de Renault Group, huit sites industriels, trois centres de R&D, et une capacité de production de 3,2 millions d’unités par an, vise un chiffre d’affaires annuel de plus de 15 milliards d’euros. Créée le 1er novembre dernier, la société Ampere (avec Nissan et Mitsubishi Motors, premiers investisseurs stratégiques), onze implantations en France, dont 4 sites industriels, a une vocation nationale. Cette entreprise est un « nouveau modèle d’entreprise automobile visant à devenir leader européen sur le marché en forte croissance des véhicules électriques », comme l’a partagé Renault, qui annonce conserver une forte majorité du capital. Et un ambitieux objectif de chiffre d’affaires : plus de 10 milliards d’euros en 2025, plus de 25 milliards d’euros en 2031. Son introduction en Bourse est envisagée dès le premier semestre 2024, « sous réserve de conditions de marché favorables », comme l’a précisé la gouvernance de Renault lors du lancement d’Ampère en novembre.

Un virage osé ?

En quoi ces deux méga missions auprès de Renault étaient-elles spécifiques pour EY-Parthenon ? Sur le fond, RAS. Le cabinet, avec l’ensemble des expertises dédiées d’EY, est aguerri sur ces sujets complexes de carve-out. En revanche, ce qui a fait la particularité de ces projets inédits : le timing.

« 18 mois pour chacun des projets à mener en parallèle, c’est très court, c’est une spécificité en soi. Ajouter à cela un projet de migration du SI Finance pour Ampere en simultané – c’est du jamais vu. Enfin, il s’agissait de deux projets à fort impact pour un des fleurons de notre industrie française, il y a une question de légitimité, de responsabilité et aussi une fierté immense d’accompagner Renault sur des sujets si emblématiques. »

Quid du risque d’une telle opération ? En jeu, quelque 25 milliards d’euros de chiffre d’affaires annuels pour les deux sociétés créées, et leurs 20 000 salariés environ (sur les 180 000 du groupe). De la pression, beaucoup de pression donc pour le cabinet.

« Évidemment, il y avait une possibilité d’échec. Le point clé c’est de garantir la continuité des opérations, il faut donc prendre des positions et se concentrer sur les Must Have au Day 1, certaines opérations peuvent être réalisées post Day 1 sans risque sur les opérations. Ensuite, il y a la question de la disponibilité des ressources ; la plupart travaillaient sur les projets Horse et Ampère en même temps. Notre rôle à nous, consultants, a été d’apporter de la méthode et de l’expérience de ce type de projet, de mettre du rythme, d’apporter des solutions de remédiation, et d’alerter quand nous avions besoin de prise de décisions stratégiques pour le projet », répond Aurélie Saulnier.

Une ligne de départ bien franchie ?

Quelques mois seulement après ces lancements, Horse et Ampere sont des opérations réussies, selon Aurélie Saulnier d’EY-Parthenon.

« Luca de Meo avait une vision très claire, un planning précis en tête, et pas l’ombre d’un doute sur la capacité de Renault à y arriver. Il a réussi à pousser le groupe sur ces projets et à en faire des succès. Nous n’aurions pas misé par avance sur la réussite aux vues de la complexité des opérations, mais ça a fonctionné. Nous avons rencontré très peu de problèmes sur Horse après son lancement. Dès son Day One, c’est une société qui tournait déjà très bien d’un point de vue opérationnel. »

Bon lancement également lors du Day 1 d’Ampere qui a bénéficié en plus de l’effet d’expérience de Horse.

« Ces deux projets sont une réelle fierté pour notre cabinet et pour nos équipes, nous sommes fiers d’avoir travaillé auprès des équipes Renault et d’avoir contribué à cette étape historique de l’histoire du groupe Renault. Il y avait beaucoup d’émotions au sein des équipes lors des deux lancements successifs. »

Satisfecit également du côté du superviseur de Horse, Grégoire de Franqueville, et cela à plusieurs titres. « Le Day 1 de Horse en juillet dernier s’est passé de manière très fluide et les opérations sont totalement en place. Notre joint-venture avec Geely pour faire de cette entité un fournisseur de premier rang de technologies hybrides est sur le point d’être finalisée. D’autres partenaires ont manifesté leur intérêt fort de nous rejoindre, confirmant notre souhait d’apporter des solutions efficaces et innovantes sur l’ensemble de la chaîne de valeurs des moteurs thermiques et hybrides. Enfin, ce projet a aussi été une aventure humaine passionnante, porté par l’ensemble des fonctions de Renault dans huit pays. »

En tout cas, la double mission d’EY-Parthenon et d’EY auprès de Renault s’arrête là, pour l’instant en tout cas. Le cabinet, qui ne fonctionne pas aux success fees, ne sera quoi qu’il en soit pas intéressé financièrement à la suite potentiellement successfull de l’histoire de Horse et d’Ampere.

EY Parthenon Aurelie Saulnier
Barbara Merle
25 Jan. 2024 à 12:00
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Adeline
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Aurelie Saulnier
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