IPEM Paris 2025 : le débrief d’un insider du Private Equity
Le PE vit un moment paradoxal : flux de deals en berne, levées de fonds très basses, dans une industrie en pleine mutation. Que s’est-il joué lors de la dernière édition parisienne de l’International Private Equity Market ?

« Sur le marché en général, curieusement, en ce moment, il se passe à la fois moins de choses, et énormément ! » partage le CEO d’Advention Alban Neveux, aux lendemains du salon qui s’est déroulé du 24 au 26 septembre au Palais des Congrès.
« Le flux de deals est beaucoup plus faible en termes de transactions – et les levées de fonds sont à des niveaux historiquement bas, observe-t-il. On oublie souvent que le private equity relève de l’économie circulaire. Si les investisseurs ont moins remonté d’argent ces dernières années, il y a mécaniquement moins d’argent réinjecté. »
Moins de volume et davantage de polarisation
Cette atonie du marché n’équivaut pourtant pas à de l’immobilisme. « Comme dans toute industrie qui atteint un certain niveau de maturité, on observe une consolidation du secteur », poursuit Alban Neveux. Le marché se polarise : les « très bons » et les « très gros » fonds accaparent l’essentiel des capitaux, tandis que les petits acteurs très spécialisés trouvent leur place. « Tous ceux qui se situent entre les deux souffrent davantage », constate-t-il.
Cette dynamique s’accompagne d’un élargissement des modèles. « Des fonds qui, auparavant, ne faisaient que du LBO, se muent en plateformes d’asset management », note-t-il. Ardian, Eurazeo, Capza ou encore Tikehau multiplient les véhicules : immobilier, infrastructure, dette privée, fonds de fonds ou encore marché secondaire. « Certains acteurs ne pratiquent donc plus le private equity tel qu’on l’entendait il y a 20 ans », ajoute Alban Neveux.
Une Europe qui reprend des couleurs
Autre évolution manifeste à l’IPEM 2025 : le retour en grâce de l’Europe. « Beaucoup d’étrangers, notamment anglo-saxons, étaient présents », relève le patron d’Advention. Une tendance confirmée par le rapport publié à l’occasion du salon par AlixPartners en partenariat avec l’IPEM, basé sur les intentions de plus de 2 500 LPs (Limited partners, investisseurs institutionnels ou privés) et GPs (General partners, fonds d’investissement). Selon ce rapport, les premiers envisagent à 67 % d’allouer des capitaux aux États-Unis dans les 12 prochains mois, contre 76 % un an plus tôt. Et 95 % des LPs présents comptent augmenter leurs allocations en Europe – malgré la guerre en Ukraine.
Souveraineté, défense, particuliers : des thématiques en plein essor
Les nouveaux terrains d’investissement ne manquent pas. « Des fonds développent des propositions autour de la défense – alors qu’il y a 5 ou 6 ans, c’était quasiment exclu », pointe Alban Neveux. Les enjeux de souveraineté – énergétique, alimentaire, sanitaire, militaire – occupent aussi le devant de la scène, sous l’effet conjugué de la crise sanitaire et de la guerre en Ukraine.
À ces thématiques s’ajoute un autre basculement : l’ouverture du private equity aux particuliers, accélérée par la loi Industrie verte. Historiquement, les LPs étaient presque exclusivement des assureurs, fonds de pension et autres institutionnels. Désormais, « les particuliers sont courtisés dans le monde entier », souligne le patron d’Advention. Via des tickets de quelques milliers d’euros, cette clientèle alimente la croissance d’un secteur à la recherche de nouvelles sources de capital.
Moins de discussions possibles pour les cabinets de conseil en stratégie à Paris ?
Depuis la période Covid, l’IPEM propose deux éditions : la première a lieu à Cannes en janvier – sa localisation historique – et la seconde, en septembre à Paris. L’édition parisienne est celle qui attire le plus de monde : 6 000 personnes contre un peu moins de 4 000 à Cannes.
« À Paris, il y a davantage d’investisseurs étrangers et surtout de LPs, détaille Alban Neveux. À Cannes, on retrouve plus l’écosystème du private equity au sens large du terme. » Un bémol cependant selon le patron de cabinet : « À Paris, les GPs sont accaparés par les LPs et donc, moins disponibles pour les autres acteurs ».
Advention a d’ailleurs choisi de ne pas avoir de stand à l’IPEM Paris cette année – une première. « Cela nous a semblé moins utile, sachant qu’en parallèle nous avions aussi moins d’associés disponibles à cette période », explique Alban Neveux. Pour autant, pas question pour lui de déserter ce rendez-vous. « Cela permet de prendre la température de l’industrie, de saisir les tendances macro du secteur. C’est aussi l’occasion de retrouver des gens que l’on n’a pas vus depuis quelque temps. La dimension relationnelle est évidemment importante. »
Parmi les cabinets du guide Consultor, seul Accuracy disposait d’un stand sur place, et même d’un speaker – Julien Baudinaud, particulièrement actif sur les dossiers d’infrastructure.
Sur le segment strat/business changes, Accuracy met en avant les axes suivants : strategy, business reviews, business plan, FP&A excellence (optimisation des processus de planification et d’analyse financière), operational excellence & data.
Un positionnement qui témoigne d’attentes accrues, de la part des fonds, de leviers tangibles de création de valeur.
L’impact sur l’accompagnement opéré par le conseil en strat
Dans le contexte actuel, l’ingénierie financière serait « plus délicate à mobiliser pour optimiser les rendements. Les taux d’intérêt étaient faibles il y a 10 ans ; or, ce n’est plus le cas. Nos clients attendent de nous qu’on leur permette d’identifier de vrais leviers de création de valeur », insiste Alban Neveux.
Ces leviers peuvent être externes (« se projeter sur un marché, anticiper une diversification ») ou internes – « gérer les opérations ou les RH, utiliser la technologie au sein de l’entreprise ». Après la vague d’apports « dans les domaines de l’agilité et de l’impact » que le secteur a connus, « la composante tech est montée en puissance – avec l’IA, même si cela ne s’y limite pas », relève-t-il.
Quant aux demandes des principaux acteurs, elles portent tout autant sur la stratégie amont – « Où aller ? Moyennant quel positionnement ? » – que sur l’opérationnalisation de la stratégie. « Il n’y a jamais eu autant de paramètres à prendre en compte, entre l’incertitude politique/géopolitique, la tech… Les demandes d’opérationnalisation sont en nette progression », confirme le CEO d’Advention.
Des lendemains plus favorables ?
Pour Alban Neveux, le private equity connaît en ce moment une crise singulière. « Là où, précédemment, le secteur plongeait puis se redressait rapidement, le PE vit une seconde année consécutive de difficultés, et les signes d’un rebond significatif ne sont pas manifestes ! » L’attentisme du marché risque donc de perdurer.
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Advention, dont environ 25 % de l’activité dépend du PE historiquement, serait toutefois relativement protégé. « Si le private equity a un peu baissé en proportion, le corporate compense largement, car il se porte très bien », conclut Alban Neveux.
Ironie de l'histoire : malgré la zone de turbulences qu'ils traversent, certains fonds investissent… dans les cabinets de conseil.
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