À la conférence de Munich, McKinsey joue les maîtres de cérémonie
Le géant du conseil s’est affirmé comme l’une des figures de l’édition 2023 de la Conférence de Munich sur la Sécurité, ce qui ne manque pas de déterrer les liens étroits qu’il entretient avec le gouvernement allemand.
Entre les murs du Bayerischer Hof s’est tenu du 17 au 19 février dernier le plus grand rendez-vous mondial consacré à la sécurité internationale. La 59e Conférence sur la Sécurité munichoise (CMS), qui rassemble chaque année plusieurs centaines de personnalités politiques, entrepreneuriales et médiatiques, fait également reposer une partie de son organisation sur l’expertise de McKinsey.
Et, si l’on en croit l’enquête menée par Politico, c’est une pratique coutumière depuis 10 ans.
Si la Conférence de Munich est chapeautée par le gouvernement allemand, elle est aussi centrale sur la scène internationale. Cette année, un an après le début du conflit russo-ukrainien, Emmanuel Macron et Olaf Scholtz y ont réaffirmé leur fermeté à l’égard de Vladimir Poutine, après avoir été appelés par Volodymyr Zelensky à « accélérer » leur soutien. Certaine de pouvoir « soulever des montagnes » pour approvisionner Kiev en munitions, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a aussi fait partie des têtes d’affiche.
On garde en tête l’« affaire des consultants », qui avait éveillé des soupçons de favoritisme entre cette dernière et le cabinet américain lorsqu’elle était ministre de la Défense allemande. Mais l’ambiguïté de la relation existante entre le forum sur la sécurité et McKinsey réside ailleurs : ce dernier fournit des prestations dites pro bono aux organisateurs, qui bénéficient ainsi gratuitement d’une expertise, mais qui en retour lui délèguent un pouvoir conséquent.
Depuis que l’ancien ambassadeur Wolfgang Ischinger a été placé à la tête de la CMS, l’évènement alors en passe de devenir has-been, a su générer 12 millions de revenus par an en rassemblant près d’une centaine de sponsors, dont McKinsey.
Régulièrement cité dans les rapports fournis par le forum, le cabinet aurait, selon des sources proches de la conférence, tenté de dicter la liste d’invités et d’orienter son programme vers les sujets qui intéressent ses propres clients. C’est le cas de la cybersécurité, sujet de prédilection d’Airbus, figurant parmi les clients de McKinsey.
Bien que le forum ait réaffirmé son « indépendance », et que McKinsey ait souligné son absence de « contrôle éditorial sur les rapports » de la CMS, le sujet pose la question du conseil pro bono, dont les cabinets pourraient tirer un profit conséquent sans que soient réglementés les conflits d’intérêts potentiels.
Et ce, d’autant plus à la lumière des scandales de McKinsey en France, mais aussi des récentes décisions de Matignon concernant la restriction de l’activité des consultants, notamment via des obligations d’autorisation préalable pour les missions pro bono.
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