A.T. Kearney veut montrer l'exemple en matière de gouvernance
Chez A.T. Kearney, les partners élisent les membres du Board et leur managing partner. Ce dernier nomme ensuite son comité exécutif (Senior Leadership Team) comme le ferait un Premier-Ministre. Les règles du jeu sont démocratiques. Résultats : les Américains ne sont pas les plus représentés dans le leadership monde. Le groupe est présidé et dirigé par le hollandais Johan Aurik et les Français ont aussi des places importantes.
En mai dernier, Sébastien Declercq, managing partner chez A.T. Kearney se rendait à Chicago, au 227 West Monroe Street, au pied du Franklin Center où se trouvent les bureaux du cabinet de conseil. L'imposant gratte-ciel de granit et d'acier de la fin des années 80 rappelle des buildings des années 1920 et la création du cabinet de conseil en 1926 par James O. McKinsey et Andrew Thomas Kearney.
Le dirigeant du bureau parisien, 47 ans, a grimpé les marches. Il fait désormais partie du cercle des 12 directors of the Board. Élu en janvier 2015, il participe donc à l'une des 5 réunions par an du Conseil, dont une a toujours lieu à Chicago.
« Lors de la dernière réunion du Board, nous avons validé la stratégie à trois ans et défini la trajectoire pour réaliser Vision 2020 qui vise à doubler de taille et à être dans le top 3 des cabinets de conseil », évoque Sébastien Declercq. Au sein du Board, le Français dit vouloir « représenter l'intérêt de l'ensemble des partners, sans distinction de practice ou de géographie, comme le font tous les autres membres du Board » .
Un Hollandais à la tête du cabinet
Rares sont les Européens qui siègent habituellement au Board des grands cabinets de conseil américains. A.T. Kearney cultive, lui, une approche d'ouverture dans sa gouvernance. Surtout depuis sa reprise de contrôle par MBO au groupe EDS par ses propres partners en 2006. Acheté par le géant informatique EDS en 1995, il avait dû se confronter à une gouvernance très corporate et des résultats décevants.
Le pouvoir est revenu entre les mains des partners. Dès 2006, le français Xavier Mesnard, partner d'A.T. Kearney, avait été ainsi élu au Board. Aujourd'hui au sommet du groupe, le hollandais Johan Aurik, installé à Londres, préside le Board of Directors, et ce pour un deuxième mandat de 3 ans, commencé en janvier 2016. Johan Aurik est aussi à la tête de la « senior leadership team » d'A.T. Kearney, équivalent du comité exécutif.
« C'est en général un "citoyen du monde" qui connaît bien les différents marchés. Johan Aurik, ancien responsable de la zone EMEA (Europe, Moyen-Orient, Afrique) a été réélu Managing Partner pour trois ans en 2015 et travaille avec des clients partout dans le monde. Il est porteur de notre stratégie de croissance et c’est aussi ce qui a plu aux partners », souligne Sébastien Declercq.
Parmi les 8 membres de la senior leadership team, on ne compte finalement que 2 Américains : le directeur du marketing et le responsable juridique. La zone Amériques a même été confiée à un Suisse, Daniel Malher. On retrouve une Française : Christine Laurens, directrice financière du groupe depuis 2014, désormais installée à Chicago. Sortie d'HEC, elle a rejoint A.T. Kearney en 2002.
Par régions, les Français ont aussi des places importantes dans les practices. Jérôme Souied dirige la practice private equity M&A pour la zone EMEA, Nicolas Lioliakis est leader de la practice financial services pour la même zone et Eric Gervet mène l'équipe globale « Digital » d'A.T. Kearney.
« Un partner égale un vote»
Comment sont choisis les membres dirigeants du cabinet ? Chez A.T. Kearney, on décrit les règles du jeu comme transparentes et démocratiques. « Nous avons inscrit dans nos statuts la règle : "Un partner, un vote", quelle que soit sa place ou son ancienneté dans la firme », se félicite Sébastien Declercq.
Pour choisir leurs membres du Board (12 partners qui ont un mandat de trois ans, renouvelable une fois), « les 350 partners du groupe élisent à la majorité des voix, après deux tours, leurs nouveaux représentants », explique Sébastien Declercq qui a obtenu de cette manière son siège. Peut-être un peu moins démocratiquement, « un premier tour vise à établir une liste de 7-8 candidats au niveau mondial, désignés par leurs pairs. S'ils acceptent de concourir, ils sont ensuite invités à présenter leurs convictions et à participer aux forums d'échange avec les partners », ajoute-t-il. Au final, le Managing Partner (Johan Aurik) a été élu par l'ensemble des partners et nomme les 8 membres du senior leadership team.
Pour participer à ce jeu démocratique, il faut évidemment faire partie du partnership. « Tous les 6 mois, la candidature de nouveaux partners est étudiée. Un comité d'élection au niveau mondial étudie chaque cas pour le compte du Board. Deux membres du comité qui n'appartiennent pas à la région du candidat se saisissent du dossier. Ils interrogent le futur partner, ses pairs, ses clients, ses équipes. Sa nomination est ensuite présentée au Board pour validation », explique Sébastien Declercq, qui est aussi à la manœuvre en tant que membre du Comité d’élection des partners au niveau mondial.
Après l'aventure EDS, Sébastien Declercq croit fermement au modèle de gouvernance de sa firme, « peut-être l'un des meilleurs des cabinets ».
Thibaud Vadjoux pour Consultor.fr
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