Automobile : dans les coulisses de la mission de Roland Berger à la Fonderie du Poitou Fonte
Pour tenter de trouver des solutions à l’avenir plus qu’incertain de la Fonderie du Poitou Fonte (fpf) à Ingrandes-sur-Vienne, fournisseur de culasses et de carters de moteurs pour Renault, le cabinet Roland Berger a été mandaté pour réaliser une étude de six semaines sur la faisabilité d’une reconversion du site. Le cabinet est actuellement en pleine phase de restitution auprès de la direction et des représentants du personnel.

Comme les autres sites de fonte français, à l’instar de la fonderie de Bretagne, elle aussi en plein tumulte, ce site va faire face à une chute du tonnage commandé et à une disparition progressive des commandes de Renault de carters en fonte.
« On nous a annoncé, il y a quelques jours, la commande de 50 000 pièces, mais on voit clairement que c’est la volonté de Liberty (groupe britannique qui a racheté les fonderies en 2019, NDLR) de dégager du cash de l’entreprise alors que Renault n’en a absolument pas besoin », confirme à Consultor Thierry Waye, le délégué CGT Fonte. Un choc pour cette fonderie mono-produit et mono-client.
Début juillet, un mouvement de grève de deux jours a été lancé pour manifester le mécontentement des salariés au lendemain de la réunion en préfecture du comité de suivi sur fpf. « On n’a pas eu les moyens de faire une grève illimitée, mais les annonces ont été catastrophiques. Ça fait une année qu’on se fait balader. Nous avons une liste de revendications et tant que nous n’avons pas de réponses, nous ne livrons rien de plus, contrairement à ce que voulait Liberty. Nous voulons des engagements forts de Liberty », déplore le syndicaliste.
Tout début juillet, deux réunions de restitution de l’étude ont eu lieu avec une équipe de cinq consultants de Roland Berger, dont l’animateur, Eric Kirstetter, senior partner et expert du secteur auto (relire notre article sur sa promotion en janvier au rang de senior partner).
Des réunions auxquelles a assisté le délégué syndical Thierry Waye en tant que chef de projet. « Ce qui pose problème avec cette organisation, c’est que le cabinet a fait ses réflexions et ses propositions seul dans son coin. On n’a vu personne du cabinet sur site. Le document présenté est le même que celui présenté aux autres filières fonte de Renault. Et on est censé avaler leurs paroles. Le gros point de désaccord, c’est l’annonce de l’extinction programmée de la fonte et donc de notre fonderie. Alors qu’on sait qu’il y a, et qu’il y aura des besoins de fonte en France et en Europe. On nous dit qu’il faut se reconvertir vers l’alu, mais cela va prendre entre trois et cinq ans. Qu’est-ce que l’on va faire d’ici là ? Comment va se passer cette phase de transition ? On n’en sait rien… Car dès que Renault va arrêter de commander des carters en fonte, il faudra faire autre chose. »
Une deuxième réunion a eu lieu jeudi 9 juillet avec le cabinet. Le but était de présenter les options de reconversion de l’entreprise. « Le cabinet avait imaginé au départ 500 possibilités, ils nous en ont présenté 60, et on s’est arrêté sur 7. Une chose est sûre, il est incontournable que vous devenions multiproduits et multiclients. Mais je vois assez mal comment on va financer ce genre d’opérations si on appartient à un groupe qui ne met pas un rond. Nous sommes très inquiets sur la volonté et la capacité de le faire. Ce que l’on porte nous, c’est qu’on est prêt à la reconversion et à apprendre de nouveaux métiers. En termes d’emploi, Eric Kirstetter a annoncé que les études aboutissaient à la suppression d’une centaine d’emplois, le tiers de l’effectif. Ça correspond à nos propres prévisions d’avenir. »
La prochaine réunion risque d’être houleuse, jeudi 23 juillet, selon les termes mêmes du syndicaliste. Au programme : Roland Berger doit donner des précisions en termes d’effectifs et sur les coûts d’investissement des sept options retenues.
Le cabinet n’en est pas à sa première fois sur ce type de dossier de sauvetage industriel : il était par exemple intervenu dans le dossier de l’aciérie Ascoval (relire notre article).
Crédit photo : Fonderie Poitou Fonte
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