Le BCG a modélisé un plan de reconstruction de Gaza prévoyant le déplacement de 500 000 Palestiniens
Plus de 12 consultants ont travaillé sur la création et le déploiement de la très controversée Gaza Humanitarian Foundation. Ils ont aussi réalisé des modélisations financières de scénarios de reconstruction incluant le départ de 25 % de la population hors de Gaza.
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Le Financial Times fait de nouvelles révélations sur cette mission du Boston Consulting Group qui se serait déroulée sur 7 mois, impliquant « des discussions internes au plus haut niveau de l’entreprise ».
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Des consultants du cabinet demandent des comptes aux instances dirigeantes. Le BCG se dit « choqué et indigné » des actions menées par deux de ses partners.
Le projet de reconstruction dont il est question – nom de code Aurora – n’est pas sans rappeler le concept de « Gaza Riviera », une vidéo à base d’IA partagée en février 2025 par Donald Trump sur son réseau social Truth Social et sur Instagram, qui avait suscité de vives réactions internationales.
Jusqu’à 500 000 personnes déplacées selon un scénario
Dès octobre 2024, le BCG aurait commencé à travailler pour le compte du think tank israélien Tachlith Institute, étant l’un des sous-traitants d’une mission confiée à la société de sécurité américaine Orbis. À cette date, le BCG présentait pourtant l’initiative comme un projet pro bono visant à appuyer la mise en place d’une organisation humanitaire.
Le cabinet aurait été choisi par l’intermédiaire de Phil Reilly, senior advisor du BCG de janvier 2017 à décembre 2024. Cet ancien de la CIA, 29 ans de maison, a créé en janvier 2025 Safe Reach Solutions (SRS), l’une des sociétés de sécurité chargées de protéger les centres de distribution de la GHF.
Or, selon le Financial Times, la mission est allée bien au-delà de l’appui à la création de la GHF. L’équipe mandatée par le BCG aurait également élaboré un modèle financier incluant l’impact économique d’une relocalisation massive de Palestiniens. L’un des scénarios envisageait le déplacement de 500 000 personnes, soit 25 % de la population de Gaza, avec un coût estimé à 9 000 dollars par individu, représentant une enveloppe globale de 5 milliards de dollars.
Une autre version du modèle, plus détaillée, proposait 5 000 dollars en espèces à chaque déplacé, un loyer subventionné pendant 4 ans et une aide alimentaire durant 1 an. L’hypothèse retenue dans ce cas estimait que 75 % des personnes déplacées ne reviendraient pas à Gaza.
Le BCG dément avoir conçu un plan de « relocalisation »
Le cabinet reconnaît toutefois avoir modélisé des hypothèses à la demande de son client.
Dès le 25 mai dernier, face aux critiques émises par plusieurs ONG et agences onusiennes – qui voient le rôle de la GHF comme une « feuille de vigne » pour les objectifs militaires israéliens, dans un contexte où l’aide humanitaire est distribuée dans des zones contrôlées par des contractuels américains et les forces israéliennes (environ 600 Gazaouis auraient été tués par balle en contrepoint de ces distributions, sans que les responsables de ces tirs puissent être clairement identifiés) –, le BCG avait annoncé se retirer de la mission.
Le cabinet a par ailleurs renoncé à ses honoraires (évalués à plus de 4 millions de dollars de travaux contractuels), et a licencié les deux associés impliqués dans la gestion du projet, Matthew Schlueter et Ryan Ordway, comme Consultor s’en est fait l’écho.
Des excuses publiques du BCG et une enquête interne
Début juin, le CEO Monde du BCG, Christoph Schweizer, a présenté des excuses publiques, annonçant l’ouverture d’une enquête confiée au cabinet WilmerHale pour faire la lumière sur les responsabilités et éviter toute récidive.
Le FT révèle toutefois que plusieurs hauts gradés du BCG ont discuté de l’initiative, dont le directeur des risques, Adam Farber, et le responsable de la practice social impact, Rich Hutchinson. Le sujet aurait notamment été abordé mi-mars par l'un des deux partners en charge de la mission, au cours d'une réunion de la practice social impact à Paris. Le géant du conseil US, qui ne le conteste pas, a indiqué aux journalistes que ses responsables avaient été induits en erreur à plusieurs reprises quant à l'ampleur des travaux, par les associés qui pilotaient le projet.
L'enquête confiée à WilmerHale est une réponse à la vive polémique interne, certains consultants ayant dénoncé le caractère profondément contraire à l’éthique de cette mission ainsi qu’une dérive par rapport aux engagements du cabinet.
MAJ 08/07 - réponse apportée par le BCG en lien avec cet article et l'article original du Financial Times
Le BCG a publié dès dimanche sur son site internet cette réaction : https://www.bcg.com/news/6july2025-clarifying-bcg-involvement-with-aid-in-gaza
Deux phrases dans votre article comportent donc des informations erronées concernant l’implication du BCG :
« Or, selon le Financial Times, la mission est allée bien au-delà de l’appui à la création de la GHF. L’équipe mandatée par le BCG aurait également élaboré un modèle financier incluant l’impact économique d’une relocalisation massive de Palestiniens. »
« Le cabinet reconnaît toutefois avoir modélisé des hypothèses à la demande de son client. »
En aucun cas le BCG a mandaté une équipe dans le cadre du « plan de reconstruction de Gaza », et en aucun cas le travail n'a été accompli au nom de BCG. Comme l’a rapporté le Financial Times, ce travail n’a pas été approuvé par BCG, et deux anciens associés l’ont entrepris malgré une interdiction explicite.
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Monde
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