Francis Rousseau, agitateur d’idées

Elle est tirée du Petit Lexique illustré des mondes des affaires, une publication parodiant la Harvard Business Review, dans laquelle sont détournés avec humour les termes corporate les plus courants. Une cinquantaine de pages éditées par Quartier Libre, la société que le fondateur d’Eurogroup Consulting – dont il n’est plus aujourd’hui que le président du conseil de surveillance – Francis Rousseau vient de créer. Cette définition résume assez bien le credo de l’homme : introduire le grain de sable qui grippe la mécanique, mais va ce faisant la faire tourner autrement. Lorsqu’il met en place chez Eurogroup Consulting la résidence d’artistes – les locaux du cabinet sont ouverts à un artiste qui les utilise comme bon lui semble pendant six mois –, c’est avec un malin plaisir qu’il observe l’agacement de ses associés et consultants : « Ils parlaient de la danseuse du président et fustigeaient les bonus qui parallèlement diminuaient. J’ai accueilli quatre artistes contemporains et j’ai arrêté dès lors que plus personne n’était choqué, que l’artiste suivant était attendu. Quand leur présence et leur travail suscitaient le débat, le conflit au sein de l’entreprise, là c’était intéressant », s’amuse Francis Rousseau. Et de se souvenir de cette œuvre d’Igor Antic, dans laquelle était photographié le marc de café déposé au fond des tasses de consultants. Cinq photographies à partir desquelles l’artiste avait demandé à une diseuse de bonne aventure rencontrée à la Foire du Trône d’exercer ses talents et de dresser le profil psychologique des buveurs de café. « Observer la curiosité des consultants, de personnes qui prônent le rationnel, pour cette œuvre totalement irrationnelle donne à réfléchir », soutient-il.
Donner à penser aux dirigeants d’entreprise, c’est justement le propos de Quartier Libre, cofondée avec Clément Berardi et Julian Eymeri. Une société que ses fondateurs présentent au barycentre du coaching, du conseil et du think tank. « Développer une stratégie exige une singularité. À cette fin, il faut que les dirigeants passent du temps à réfléchir et se forgent une vision », préconise Francis Rousseau. Pour ce faire, nulle offre mais une méthodologie. « Nous avons une expérience dans le conseil, moi en tant que chef d’entreprise, une bonne capacité d’écoute, quelques idées, même si nous ne voulons pas les imposer, et la volonté d’aider les dirigeants à créer leur propre voie », poursuit-il. Un accompagnement qui passe par la réflexion, l’ouverture aux autres, aux métiers que les dirigeants n’ont pas l’habitude de côtoyer : un architecte, un artiste… « Quelqu’un nous parle de déménagement ? Nous l’aidons à réfléchir à la ville de demain. Nous sommes également allés à Détroit, une ville symbole à la fois de la fin d’une culture et d’un monde industriel et architectural en renaissance », cite en exemple Francis Rousseau.
La proposition pourrait ressembler à une antithèse de l’offre des cabinets de conseil en stratégie, que Francis Rousseau n’hésite pas à critiquer vertement : « Au même titre que les auditeurs et les agences de notation, ils font partie de ces activités qui ont précipité le monde non pas vers une crise, mais vers une rupture. Depuis quinze ans, ils regardent dans le rétroviseur pour aider les entreprises à aller de l’avant et manient des concepts qui sont aujourd’hui dénués de sens ». Un comble pour celui qui a fondé et dirigé pendant trente ans un cabinet de conseil en management ? « Je ne crache pas dans la soupe. Le métier que j’exerce aujourd’hui n’a strictement rien à voir avec Eurogroup. Au contraire, si j’arrive à bien faire ce métier-là, je pense qu’il devrait y avoir beaucoup de travail pour les cabinets de conseil. Je reproche surtout à ces derniers d’agir sans pensée créative. C’est sur cette réflexion en amont que nous souhaitons intervenir ».
Par Gaëlle Ginibrière pour Consultor, portail du conseil en stratégie-10/10/2013
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