Une charité pas très chrétienne
Aux États-Unis, le rôle de McKinsey dans la recherche de profit à tous crins du groupe hospitalier Providence, en théorie tenu de soigner gratuitement les patients les plus modestes, est épinglé par le New York Times. La mission a donné lieu au paiement de 45 millions de dollars d’honoraires.
- Opioïdes : une addition vertigineuse de 1,5 milliard de dollars pour McKinsey aux USA
- Scandale des opioïdes : l’addition s’alourdit de 78 M$ pour McKinsey
- McKinsey au chevet du géant de la santé grand public
- Pharma : les années conseil du nouveau DG de bioMérieux
- Sénat : les conseils de la « Big Pharma » passés au gril
- Pharma : la relocalisation, un coup com’ ?
- L’atout santé du nouveau partner d’EY-Parthenon
- Sanofi : le background BCG du nouveau patron de la santé grand public
Providence est un important groupe hospitalier américain. Il compte 51 hôpitaux, 900 cliniques et génère un important revenu de 27 milliards de dollars en 2021. La chaîne d’hôpitaux, fondée en 1850 par des nonnes, compte parmi la moitié des 5 000 hôpitaux américains à être tenus à une part de soins philanthropiques.
Ces établissements de soins sont exempts de plusieurs taxes – de l’ordre de 1 milliard de dollars pour Providence par exemple.
En échange, l’État leur demande de prendre en charge les patients les plus modestes (le niveau en deçà duquel les frais de santé des patients sont pris en charge est défini état par état. Dans l’état de Washington où est domicilié Providence, c’est 83 250 dollars pour une famille de quatre personnes).
Mais nombre d’entre eux sont devenus assimilables à des entreprises hospitalières classiques, la recherche de marge allant croissant chez nombre d’entre eux.
C’est en sens que, en 2018, Providence met sur les rails le programme Rev-Up (revenue up). Il est façonné avec le concours de McKinsey.
Objectif : limiter le nombre de patients non facturés, car pris en charge par Medicaid – assurance maladie dédiée aux individus et foyers les plus modestes.
McKinsey participe à la constitution de formations destinées aux salariés de Providence. Ils sont alors priés d’être beaucoup plus incisifs auprès des patients pour qu’ils paient, quel que soit leur niveau de revenu. Des scripts de stratégie oratoire à déployer avec les patients sont rédigés.
La question type à poser à tous les patients : « Comment souhaiteriez-vous régler ? » Si cela ne fonctionnait pas, l’étape suivante consistait à réclamer la moitié du solde. Ou à proposer un échelonnement de la créance sous la forme d’une mensualisation.
Les patients étaient ensuite relancés par courriers successifs jusqu’à ce que des entreprises de recouvrement de créances soient mandatées.
Pas loin de 55 000 patients ont ainsi été relancés, pour un total de 73 millions de dollars.
Une méthodologie et des formulations avec lesquelles Providence prend ses distances. Interrogé par le New York Times, le groupe a fait savoir que « les documents de formation du personnel établis par McKinsey n’étaient pas en ligne avec ses valeurs ». À la suite de la publication de l’enquête du New York Times, quelque 700 patients devaient être remboursés des frais de santé qu’ils ont réglés à Providence.
1,4 % : tel était la part de coût des soins fournis par Providence qui, en 2018, allait à des patients à faible revenu. Elle avait chuté à moins de 1 % en 2021.
à lire aussi
En quinze ans, les missions de conseil en stratégie de cabinets privés se sont multipliées dans les hôpitaux publics et atteignent aujourd'hui un plateau.
Enquête sur les raisons de cet essor, la nature réelle des missions conduites par les consultants, les causes des nombreuses critiques dont elles sont l'objet et les objectifs poursuivis par les consultants qui y participent.
Un tuyau intéressant à partager ?
Vous avez une information dont le monde devrait entendre parler ? Une rumeur de fusion en cours ? Nous voulons savoir !
commentaire (0)
Soyez le premier à réagir à cette information
pharmacie - santé
- 18/10/24
Le géant du conseil s’apprêterait à conclure un accord avec les procureurs américains afin de mettre un terme aux enquêtes fédérales toujours en cours. L’impact financier pour les associés mondiaux serait une nouvelle fois significatif.
- 14/10/24
Vente d’Opella, la branche santé grand public de Sanofi qui produit notamment le Doliprane, tentative de cession – ajournée – de Biogaran par Servier… Que disent ces mouvements des conditions actuelles de la création de valeur dans l’industrie pharmaceutique ? Le regard de plusieurs associés d’Advention, CVA et Eight Advisory S&O.
- 18/07/24
Pierre Kemula, actuel CFO de CureVac, alumni de Kéa et Roland Berger, assurera la direction financière d’Agomab dès novembre prochain.
- 15/07/24
Pour pallier la démission de son directeur général, Virbac nomme l’actuel directeur des Affaires financières du groupe, Habib Ramdani, DG par intérim.
- 20/06/24
Julie Dollé, près de 11 ans de BCG à son actif, vient de quitter le cabinet de conseil en stratégie afin de lancer son entreprise. L'ex-partner spécialisée en développement durable veut créer un réseau de maisons de soins de support (non médicaux) pour les malades atteints de cancer pendant et après la maladie (les Maisons Soma).
- 07/06/24
Après plus de 6 ans passés chez Strategy&, Benoît de Rességuier a rejoint Sanofi Pasteur, la division Vaccins du groupe Sanofi, pour piloter la Capacité opérationnelle et la Transformation.
- 03/06/24
Alumni de Bain & Company, Jean-Charles Brandely, 46 ans, est nommé CEO du groupe MediSup. Un centre de formation privé créé en 1995 dédié à la préparation aux études médicales (30 centres, 7000 étudiants).
- 30/05/24
Ce nouveau rebondissement est lié à l’une des enquêtes lancées par le Parquet national financier (PNF) en octobre 2022, après les conclusions du rapport sénatorial consacré à l’influence des cabinets de conseil externe sur les politiques publiques.
- 01/01/24
Trois ans après avoir noué un faramineux accord transactionnel avec le gouvernement fédéral américain pour sa responsabilité dans la crise de dépendance aux antidouleurs, McKinsey accepte de régler 78 millions de dollars supplémentaires aux acteurs de l’assurance santé aux États-Unis.