Angola : BCG, McKinsey et PwC entachés par les « Luanda Leaks »

Facilitation d'ouvertures de comptes bancaires non transparents, paiements de missions via des sociétés domiciliées dans des paradis fiscaux, aide à l'optimisation fiscale, absence de signalement aux autorités de mouvements comptables non justifiés : tels sont quelques-uns des actes qui sont reprochés au BCG – The Boston Consulting Group, à McKinsey and Company et à PwC dans les « Luanda Leaks », du nom de la capitale de l’Angola.

Consultor.fr
21 Jan. 2020 à 17:01
Angola : BCG, McKinsey et PwC entachés par les « Luanda Leaks »

Cette enquête est consacrée aux sources de la fortune de la milliardaire angolaise Isabel dos Santos, âgée de 46 ans, la fille de Jose Eduardo dos Santos, qui a dirigé l’Angola d’une main de fer pendant trente-huit ans (1979-2017), et de son mari danois d'origine congolaise Sindika Dokolo.

La « princesse de Luanda » est accusée d’avoir « siphonné les caisses du pays », selon l'AFP qui cite Le Monde. Sa fortune personnelle est estimée à plus de deux milliards de dollars, notamment bâtie par ses participations dans les sociétés angolaises d'exports de diamants, de pétrole, de télécommunications ou de banque. Déjà en décembre, la justice angolaise la soupçonnait d’avoir détourné, avec Sindika Dokolo, plus d’un milliard de dollars des comptes des entreprises publiques Sonangol (pétrole) et Endiama (diamant) pour nourrir ses propres affaires. Isabel dos Santos avait été nommée en 2016 par son père à la tête de la société Sonangol.

L'enquête, fondée sur la fuite de 715 000 documents, a été publiée dimanche 19 janvier par le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ). Elle décrit une « nébuleuse composée de 400 sociétés identifiées dans quarante et un pays » qui aurait permis à Isabel dos Santos de pratiquer un « schéma d’accaparement des richesses publiques », selon Le Monde, l'un des médias associés à l'enquête internationale.

Le concours du BCG à Grisogono, le bijoutier suisse de luxe, au capital duquel Sindika Dokolo est un des principaux investisseurs, y est pointé du doigt. Une équipe de consultants du bureau de Lisbonne y est intervenue alors que, durement endetté, le bijoutier fut renfloué par la Sodiam, la société nationale d'extraction de diamants, à hauteur de 120 millions de dollars. Les missions du BCG se sont limitées à trois projets et se sont arrêtées en 2013, assure le cabinet cité par le New York Times, en réaction à ces publications.

Autre allégation concernant le BCG et McKinsey : ces deux cabinets ont accepté le paiement de missions de restructuration de la Sonangol, l'entreprise publique pétrolière, non pas en direct, mais via Wise Intelligence Solutions, une société établie à Malte et créée par décret de Jose Eduardo dos Santos. Ces missions se sont arrêtées en novembre 2017, a fait savoir le BCG. PwC et McKinsey n'ont pas donné de détails sur le calendrier de leurs missions pour la Sonangol.

Le dernier volet consulting de cette enquête concerne PwC. Il est reproché au cabinet d'avoir concouru à l'optimisation et à l'évasion fiscales d'une vingtaine de sociétés détenues par Isabel dos Santos et que ces missions lui ont été payées, là encore, par Wise Intelligence Solutions. Toujours concernant PwC, les documents consultés par le consortium de journalistes montrent que le cabinet a accepté de taire, dans au moins un rapport annuel de l'une de ces sociétés, le lien entre cette société, Grisogono et Sindika Dokolo. Autre critique adressé à l'auditeur : plusieurs mouvements comptables significatifs non documentés auraient dû l'amener à opérer des signalements auprès d'autorités de régulation. Ce qu'il n'a pas fait. 

Sindika Dokolo et Isabel dos Santos ont vivement critiqué ces publications, dénonçant un règlement de compte politique du nouveau pouvoir en place. João Lourenço a succédé en septembre 2017 à Jose Eduardo dos Santos à la présidence de la République d'Angola.

PwC a fait savoir qu'il enquêtait sur les missions conduites par le cabinet auprès d'Isabel dos Santos et qu'il cesserait ces missions à l'avenir.

Le BCG a indiqué avoir pris toutes les mesures nécessaires au moment de la conduite de missions en Angola auprès d'Isabel dos Santos pour veiller à respecter ses règles de conformité internes et éviter tout risque de corruption.

McKinsey estime ces accusations préoccupantes et indique n'avoir aucune mission en cours avec Isabel dos Santos ou des entreprises lui appartenant.

Crédit photo : vue de Luanda, Maximo Adobe Stock licence standard.

Boston Consulting Group McKinsey
Consultor.fr
21 Jan. 2020 à 17:01
tuyau

Un tuyau intéressant à partager ?

Vous avez une information dont le monde devrait entendre parler ? Une rumeur de fusion en cours ? Nous voulons savoir !

écrivez en direct à la rédaction !

commentaire (0)

Soyez le premier à réagir à cette information

1024 caractère(s) restant(s).

signaler le commentaire

1024 caractère(s) restant(s).
7 + 4 =

Monde

  • IA : 20 % des revenus monde du BCG en 2024, déjà 25 % en France ?
    06/05/24

    Le BCG a certes vu sa croissance mondiale ralentir en 2023 à + 5 %. Mais le cabinet pourrait avoir fait le bon calcul en misant très tôt sur le potentiel de l’intelligence artificielle via son unité BCG X. Résultat : au niveau mondial, le conseil en IA et Gen AI devrait représenter un cinquième de ses revenus en 2024. En France, c’était déjà un quart l’an dernier.

  • Des chercheurs remettent en cause plusieurs études de McKinsey sur la diversité
    02/05/24

    « Les entreprises américaines dont l’équipe dirigeante est ethniquement diverse sont plus performantes que les autres » : c’est le résultat largement médiatisé d’une série d’études successives du cabinet McKinsey sur le sujet. Mais deux chercheurs américains ont refait les calculs : ils ne trouvent aucune corrélation entre performance et diversité des dirigeants.

  • McKinsey au cœur d’une enquête criminelle du ministère de la Justice américain
    27/04/24

    Nouvel épisode dans le scandale des opioïdes aux États-Unis : McKinsey fait l’objet d’une enquête criminelle pour sa contribution à la « dynamisation » des ventes d’analgésiques de plusieurs grands groupes pharmaceutiques — et pour une possible entrave à la justice.

  • Aux États-Unis, moins de promotions et des « invitations » à partir
    26/04/24

    De nouveaux signes de la morosité qui règne dans les cabinets de conseil, avec les revues de performance de milieu d’année qui battent leur plein. Elles visent – clairement – à orienter les consultants jugés sous-performants vers la sortie. Les promotions sont aussi plus difficiles à obtenir.

  • Oliver Wyman : un CA en hausse de 13 % au T1 2024, malgré un contexte chahuté
    24/04/24

    À la fin de chaque trimestre, la maison-mère du cabinet Oliver Wyman, Marsh & McLennan Companies, publie ses résultats. En janvier, février et mars 2024, le chiffre d’affaires d’OW a atteint 789 millions de dollars.

  • Durabilité : en Europe, le BCG peaufine son droit avec un nouveau senior advisor
    17/04/24

    Le Boston Consulting Group s’est doté d’une nouvelle expertise – de niche – avec l’arrivée comme senior advisor de Baptiste Carrière-Pradal, expert en matière de législation européenne concernant la durabilité, particulièrement dans les secteurs de la mode, du luxe et du sport.

  • BCG : un taux de croissance qui s’essouffle en 2023
    16/04/24

    + 25 % en 2021, + 11 % en 2022 : après 2 années de très forte croissance, le géant du conseil américain marque le pas en 2023 avec un chiffre d’affaires en hausse de 5 % seulement, à 12,3 milliards de dollars. L’augmentation de ses effectifs se fait plus ténue également.

  • PMP Strategy déploie ses ailes internationales
    11/04/24

    Denis Lafarge, associé de la pratique TMT Digital et Infrastructure en Europe de PMP Strategy, quitte Paris pour développer un bureau sur l’emblématique Park Avenue de New York, d’où il pilotera la région US.

  • Une lettre anonyme sème le trouble chez McKinsey
    27/03/24

    Nouveau rebondissement pour le géant mondial du conseil, en Europe cette fois. McKinsey est en effet déstabilisé par une lettre anonyme supposée émaner d’anciens associés. Le point sur les faits.

Super Utilisateur
Monde
angola, isabel dos santo, sindika dokolo
2530
Boston Consulting Group McKinsey
0
Monde: Angola : BCG, McKinsey et PwC entachés par les « Luanda Leaks