Sauver les entreprises « d’avant » et réfléchir à celles « d’après » : la double demande des clients

Alors que la récession frappe durement dans tous les secteurs de l’économie, les consultants en stratégie, pour la moitié d'entre eux qui ont pour l'heure de l'activité, sont à pied d'œuvre. Ils sont sollicités sur nombre de sujets à court terme tels que la reprise de l’activité, l’organisation de la production et la R&D dans un univers économique très contraint.

 

 

01 Jui. 2020 à 12:37
Sauver les entreprises « d’avant » et réfléchir à celles « d’après » : la double demande des clients

Un effort à court terme qui doit aussi les amener à dessiner une entreprise de demain à la production relocalisée, plus frugale, plus agile, aux règles de gouvernance clarifiées. Ces deux sujets interviennent de front.

Après l’impact de la crise sanitaire, l’économie mondiale s’apprête à affronter ce qui s’annonce comme l’un de ses pires chocs économiques. Pas une semaine en effet sans que s’amoncellent les nuages noirs... Des pans entiers de l’économie semblent menacés : industrie aéronautique, automobile, distribution… La vague risque d’être violente pour tous ces secteurs qui, outre des leaders mondiaux, comptent, en France, une kyrielle de sous-traitants.  

La récession dans tous les secteurs

À Toulouse notamment, l’avionneur européen Airbus a déjà annoncé une baisse très importante de son activité. Une catastrophe pour toute la filière, avec 200 000 emplois – directs et indirects – potentiellement menacés. Plus au nord, ce sont les salariés du constructeur automobile Renault qui toussent, et toute la France qui risque de s’enrhumer.

Dans le secteur de la distribution, les annonces de placement en redressement judiciaire se multiplient : Naf-Naf, La Halle, Camaïeu… Au point que certains experts prédisent, pour bientôt, un « retail apocalypse » avec la fermeture de 30 % des 40 000 boutiques indépendantes de prêt-à-porter de l’Hexagone. 

Une hémorragie sur le front de l’emploi largement amortie, pour l’instant, – mais pour combien de temps encore ? – par le dispositif de chômage partiel que l’État a revu à la baisse ce 1er juin 2020. Plusieurs secteurs s’attendent déjà à de sérieuses coupes dans leurs effectifs, dès la rentrée. 

Reprises d’activité, organisation opérationnelle en interne, accompagnement des fournisseurs : les ressorts de la demande de conseil 

Rien d’étonnant donc, dans pareil contexte, à ce que les consultants en stratégie aient été largement sollicités depuis la mi-mars par leurs clients. Car, pour certaines entreprises, et pas des moindres, se joue désormais un peu de leur survie.

« À court terme, pour passer le cap de la crise sanitaire actuelle et relancer leurs activités, les entreprises ont à gérer des questions très opérationnelles, telles que la gestion de leur trésorerie, la redéfinition des modes opératoires en interne et l’accompagnement des fournisseurs et sous-traitants, souligne Éric Ciampi, partner en charge de la practice Operations chez Oliver Wyman. Nous accompagnons certains de nos clients dans la coordination de leurs actions de reprise d’activités, par exemple, en identifiant les fournisseurs à risque ou en repriorisant les projets d’amélioration. »

Une question de priorités qui déborde d’ailleurs largement le cadre de la production. « Dans les centres de R&D la question se pose aussi, poursuit le consultant. Comment doit-on prioriser les budgets ? À quel niveau ? Doit-on les renforcer pour accélérer le développement de nouveaux produits ou services plus adaptés au monde d'après-crise ? »

Le BBZ, la machine à réduire les coûts, est à nouveau de sortie

Olivier Paget, en charge des problématiques d’optimisation des coûts chez Cylad Consulting, dont certains clients historiques s’appellent Airbus, Naval Group, Alstom ou encore Safran, confie avoir été sollicité « pour aider ses clients à se concentrer sur l’essentiel » notamment la priorisation de leurs projets de transformation et/ou IT.  

Ce qui passe par un recours plus fréquent au budget base zéro, communément appelé « BBZ ». Son principe est aussi simple que radical a priori : au lieu de définir les budgets de chaque département d’une entreprise sur la base de celui de l’année précédente, on demande aux managers de justifier de chaque dépense pour la nouvelle année. Ce qui implique d’interroger le bien-fondé de ces dépenses et de se donner des opportunités plus fréquentes de les couper si elles ne sont plus nécessaires.

« Pour repartir de zéro et éviter d’hériter des dépenses des années précédentes. Surfaces, outillages, ressources directes ou indirectes, le BBZ nous permet de relier plus directement les dépenses à leur utilisation, et de renforcer les modèles de gestion directe. Soit en rapport avec le produit vendu. Soit avec le projet de développement à venir. Pour être sûr que cela correspond bien à une utilisation réelle pour l’entreprise », détaille Olivier Paget, dont le cabinet a notamment accompagné la décroissance des coûts fixes de l’A380. Comprendre : les coûts dispensables seront d'autant mieux traqués et supprimés.

Éviter de se tirer une balle dans le pied ! 

Mais, au-delà des mesures de réduction de coûts, les cabinets visent surtout, plus loin, et œuvrent en faveur d’un retour à la croissance. Et, c’est certainement pour bien le signifier à ses clients et à la communauté que Mawenzi Partners s’est associé avec Ressource Consulting, cabinet spécialisé en optimisation des coûts afin de proposer « un plan de rationalisation au service de la croissance pour dépasser la crise », explique Pierre-Éric Perrin, associé fondateur chez Mawenzi.

Avec à chacun son expertise : la rationalisation des dépenses pour Ressource Consulting ; préparer la relance pour Mawenzi. Et Pierre-Éric Perrin de souligner : « Nos deux expertises sont complémentaires. Nous ne sommes pas là pour couper les coûts, mais bien pour redéfinir les besoins en prévision de la relance. » Ce qui nécessite, bien sûr, de prendre des décisions à court terme. Tout l’enjeu étant d’éviter celles qui pénaliseront la capacité de relance des entreprises. Ou comment éviter de se tirer une balle dans le pied ! Pour ce faire, les équipes menées par Mawenzi aident les entreprises à construire leurs scénarii d’atterrissage en passant au crible l’ensemble des structures de coûts.

Un retour à la normale espéré en 2021, avec de nouveaux modèles opérationnels 

Un atterrissage par exemple espéré dans les prochaines semaines dans le retail avec la réouverture des points de vente, et un possible retour à la normale de la consommation nationale en 2021.

Avec, à plus long terme, la question du « comment rebondit-on ? » souligne Éric Ciampi, chez Oliver Wyman France. « Comment se projette-t-on dans le futur ? Comment se réinvente-t-on pour être plus compétitif ? Et, comment, dès lors, repositionne-t-on son portefeuille d'activités ? »

Des questions qu’il convient « nécessairement de prendre par le haut pour dessiner de nouveaux modèles opérationnels et des organisations plus agiles et plus résilientes, en s’attelant à tous les aspects : business unit, business line, géographies, métiers et la gouvernance associée… » souligne le consultant. Avec pour conséquence le recours à des organisations plus lisibles et moins matricielles.

L’idée étant, partout où cela est possible, de challenger les modèles existants au prisme de la durabilité sociale et environnementale « pour préparer le business de demain et sa stratégie de croissance », estime, quant à lui, Pierre-Éric Perin chez Mawenzi.

Et, Éric Ciampi de se projeter un peu plus dans l’avenir : « Le footprint industriel de demain ne sera probablement plus le même. Avec la fermeture des frontières un peu partout, cette crise a en effet montré les limites de la mondialisation et la nécessité de sécuriser la souveraineté nationale de certaines activités industrielles sensibles. Ainsi, la question de la relocalisation de centres de production se pose en France, mais plus globalement en Europe et en Afrique du Nord, dans une logique de nearshore (recourir à des prestataires locaux sur le territoire national ou à des sous-traitants de proximité moyenne, NDLR). »

Bref, bien au-delà des seules réductions de coûts, pour le conseil, l’accompagnement lié à la crise du coronavirus et ses conséquences ne fait que commencer. Et, ce premier été post-covid s’annonce déjà loin des plages et de tout repos pour les consultants en stratégie.

Par Étienne Thierry-Aymé pour Consultor.fr

 

Oliver Wyman Éric Ciampi Pierre-Éric Perrin
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