Pro bono : ce que Bain a fait pour le MBA de HEC

 

'Bain & Co peut s'offrir le luxe d'une approche désintéressée', dit Bernard Garrette, le directeur délégué du MBA HEC.

Bain & Company est intervenu à titre gracieux à la demande d'HEC, pour refondre le MBA de l'école. Bernard Garrette et Bertrand Pointeau, senior partner chez Bain & Co, expliquent les raisons de cette association.

 

Benjamin Polle
29 Jui. 2012 à 02:00
Pro bono : ce que Bain a fait pour le MBA de HEC

 

"Une première en France"

La décision prise par la direction de l'emblématique école de management de Jouy-en-Josas, en 2011, de faire intervenir Bain & Co, pour refondre la structure de son master in business administration (MBA) reposait sur un double constat. En premier lieu, le marché européen des MBA s'adresse aux cadres en cours de carrière qui souhaitent élargir leurs connaissances et le champ de leur employabilité. Il se réduit à quelques grandes institutions, qui n'ont pas les mêmes cibles de recrutement que les universités américaines ou asiatiques. On trouve dans ce minuscule groupe de tête : l'Insead (Institut européen d'administration des affaires), la London Business School et Cambridge, l'IMD (International Institute for Management Development) en Suisse, IE Business School à Madrid et l'Esade à Barcelone, l'Iese (Université de Navarre), et HEC, mais à une place que l'école souhaite voir évoluer.

D'où l'intervention de Bain, résultat de ce second constat : le MBA de HEC est classé derrière le peloton des cinq meilleures écoles européennes, qu'elle souhaite pourtant intégrer de façon pérenne.  Entre 2010 et 2012, le MBA HEC est à la 18e dans le classement réalisé par le Financial Times.

"C'est le genre de curriculum review qui doit être fait tous les cinq ans. Il s'agit de vérifier que le programme répond bien à la demande, et en plus je venais juste d'intégrer mon poste", raconte Bernard Garrette, lui-même brièvement expert sectoriel en 2000 et 2001 chez McKinsey, et nommé directeur délégué du MBA en janvier 2011.

Bernard Garrette, directeur délégué MBA HECLe pro bono chez Bain, quèsaco ?

Ce n'est pas le premier partenariat du genre entre une formation supérieure et un cabinet de conseil. La Kellogg School par exemple : l'école de management réputée dans la proche banlieue de Chicago, a fait appel à Booz&Co et au BCG. Et dans ce cas, Bain, au même titre que McKinsey, est membre de la puissante fondation de l'école et nombre de ses recrues en proviennent.

"Bain a déjà fait plusieurs missions pro bono dans le domaine éducatif, à Berkeley, à University of North Carolina, à Cornell et récemment à University of North Texas, ainsi que dans une université coréenne. Mais il est vrai que c'est une première en France sous cette forme-là", indique Bertrand Pointeau.

Il s'est agi pendant quatre mois – entre avril et juillet 2011 –  d'allouer un consultant à plein temps, encadré par Jean-Marc Leroux, président de Bain France et Bertrand Pointeau, qui ont tous deux consacré un bon quart de leur temps à la réalisation de la mission.

"Le pro bono correspond à un engagement a priori de notre part à nous investir dans certains domaines sociétaux qui sont définis sur la base de discussion en interne, comme l'éducation ou l'environnement. Nous y consacrons un staffing réel choisi sur le mode du volontariat. Et attention, un consultant qui s'engage dans une mission pro bono est assujetti aux mêmes exigences que pour une prestation facturée. Un coaching et une revue de performance sont organisés de la même façon", plaide Bertrand Pointeau, sans toutefois vouloir indiquer le budget ou le volume horaire annuel qui y sont consacrés au total.

Et d'ajouter que ce n'est pas non plus une voie de garage pour consultant sous-performant : "À HEC, par exemple, l'exposition relationnelle dont a bénéficié notre consultant, tant auprès de la direction de l'école que de jeunes chercheurs qui sont sortis il y a un ou deux ans de Harvard ou Stanford, est très significative. On ne pouvait pas baisser notre garde", se souvient Bertrand Pointeau. Une mission pro bono, à l'entendre, est un tremplin de carrière aussi bon qu'une autre prestation du cabinet tarifée au prix normal du marché.

"Normalement, c'est le genre de modification que nous traitons en interne mais j'ai souhaité dans ce cas faire appel à Bain, pour bénéficier d'un point de vue extérieur. En interne, la démarche peut aboutir à un marchandage entre professeurs, qui agréent tous les changements du moment qu'ils n'affectent pas leurs propres cours. La montagne peut accoucher d'un souris. Un consultant de Bain s'est chargé de contacter quelques-uns des grands recruteurs des étudiants diplômés d'un Bertrand Pointeau Senior Partner Bain & CompanyMBA HEC, c'est-à-dire une vingtaine de multinationales françaises et étrangères. Il a aussi réalisé un benchmark de la concurrence en Europe avant de nous remettre des recommandations fin juillet", explique Bernard Garrette.

Bain n'exclut pas davantage de recrutements à HEC

Le nouveau programme sera déployé pour la première fois en septembre prochain, puisque dans l'intervalle il fallait en finaliser les contours sur la base des recommandations de Bain, en interne ce coup-ci, et en faire la promotion aux  futurs étudiants.

Cette nouvelle version du MBA se veut plus centré sur les fondamentaux de la gestion, avec un parcours censément moins standardisé que ses concurrents. Un cours d'éthique a été ajouté, une cinquième spécialisation dans le domaine du leadership est sortie de terre et les futurs étudiants pourront ajouter 100 heures de spécialisation sectorielle dans les domaines du luxe, de l'énergie ou de l'immobilier, tirées du programme grande école ou des masters spécialisés du groupe HEC. Bain a aussi appelé à diversifier les recrutements dans les secteurs de la banque et du conseil, au lieu d'une dominante actuelle dans la haute administration et les grandes entreprises. Et, enfin, de jouer à fond la carte de l'aménagement du plateau de Saclay en Silicon Valley à la française, si le nouvel exécutif à la tête de l'État le veut bien. "Nous voulions fournir au programme MBA un socle de départ pour une dynamique de changement très rapide que l'école dans son ensemble, par exemple dans l'internationalisation de ses élèves et le rajeunissement de son corps professoral, a déjà engagé", résume Bertrand Pointeau

"Cette intervention a lancé un message sur la pertinence du MBA HEC, et nous avons pu d'ores et déjà en constater les effets auprès des candidats recrutés pour la rentrée de septembre. Le bénéfice pour Bain et nous-mêmes est double", assure quant à lui Bernard Garrette au sujet de l'impact de Bain sur le contenu et la visibilité du programme.

La mission est officiellement clôturée depuis un an, mais la petite équipe des Bainies n'en garde pas moins un œil attentif sur les suites de son intervention. "Nous faisons encore des points réguliers, le cordon ombilical n'est pas encore coupé", s'amuse Bertrand Pointeau. De là à parier sur la hausse des HEC qui intégreront Bain & Co, il n'y a qu'un pas que Bertrand Pointeau franchit tout en diplomatie.

"Nous avons un long historique de recrutement chez HEC. Mais notre intervention crée un halo de notoriété auprès des étudiants qui fait preuve d'un bon vouloir partenarial, et constitue un terrain propice", dit-il.

Par Benjamin Polle pour Consultor, portail du conseil en stratégie- 29/06/2012

 

Jean-Marc Le Roux
Benjamin Polle
29 Jui. 2012 à 02:00
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Jean-Marc Le Roux
2021-10-30 21:04:46
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